En tant qu’enfant des années 90, j’ai forcément éprouvé une certaine fascination pour certains concepts de la période, qui ont une place particulière dans mon cœur rien que pour le fait d’avoir grandi avec et d’en avoir gardé de très bons souvenirs. Enfin… du moins, pour ceux que j’avais regardés. Si ça se trouve, si j’avais suivi Que le meilleur gagne à l’époque, j’aurais été beaucoup plus tendre avec… ou alors j’aurais déjà trouvé ce jeu beaucoup trop verbeux (surtout du haut de mes trois ou quatre ans, donc bon…), et confirmé ce ressenti d’ennui en tant qu’adulte. Donc, oui, c’est en partie pour ces raisons-là que j’aime encore plus que je ne le devrais des émissions comme Pyramide, Fort Boyard ou Mokshû Patamû.
Mais bon, j’ai grandi ; et avec le recul, j’arrive à présent à différencier les qualités intrinsèques d’un programme du bon souvenir nostalgique qu’il m’a laissé. Pour certains programmes comme Pyramide ou Fort Boyard, ceux-ci sont restés suffisamment solides pour que je continue à les adorer en tant qu’adulte (donc oui, quand je dis que j’exècre ce qu’est devenu FB dans les années 2010, c’est bien par rapport à des critères qualitatifs, et non par envie irréfléchie de balancer la rengaine du « C’était mieux avant »…) ; toutefois, ça a moins été le cas pour Mokshû Patamû, ou encore le jeu d’aujourd’hui.
Qui est qui ? est donc un jeu arrivé sur France 2 en 1996, et présenté par Marie-Ange Nardi. Et personnellement, ça me fait du bien de pouvoir la mettre davantage à l’honneur, là où dans la plupart des autres jeux que j’ai traités où elle était intervenue, c’était soit juste en tant que co-animatrice, soit en tant que… fossoyeuse (Cluedo, La Cible, Tout vu tout lu et Pyramide, même si dans ce dernier elle avait également été un bon Maître-mot). Mais bon, ce n’était pas sa faute si on lui donnait des jeux qui avaient déjà fortement décliné en audiences au préalable.
Bref. Elle a donc animé le programme jusqu’en 2002, c’est-à-dire jusqu’à la fin de sa diffusion. Car, malheureusement, QEQ fait partie de ces programmes iconiques des années 90 à ne pas avoir survécu au début des années 2000 et à leurs nouvelles tendances. Mais bon, 6 ans de bons et loyaux services, ce n’est tout de même pas rien ! (Surtout quand des jeux comme Trouvez l’intrus ont eu droit à la même longévité alors qu’ils ne le méritaient pas du tout…)
Cependant, je reconnais qu’en dehors de son ambiance, très typée 90’s… ce n’est malheureusement pas très difficile de relever des points discutables, que je vais aborder plus en détail.
Le concept
Le concept est tout simple : trois candidats sur le plateau doivent déterminer quel.le.s sont les professions et/ou hobbies de six spécialistes. Professions/hobbies donné.e.s dès le départ, mais évidemment sans préciser à quel.le spécialiste il/elle est attribué.e. Le but des candidats sera donc de déterminer qui est qui (titre !).
Pour ce faire, ils doivent passer deux manches, lors desquelles ils font appel notamment à leur intuition, puis aux « performances » des spécialistes, afin d’obtenir le meilleur score possible ; car à l’issue de chaque manche, le candidat le moins bon est éliminé.
Le candidat finaliste doit alors associer les six spécialités aux six spécialistes ; et plus il aura deviné juste, plus il remportera d’argent.
Conceptuellement parlant, je vous avoue que je ne suis généralement pas plus fan que ça des concepts de jeux « à l’intuition » ; et que c’est d’ailleurs pour cette raison-là que j’ai vraiment rattrapé Guess my age à reculons, ou que je n’ai pas cherché à découvrir Couple ou pas couple.
Toutefois, sur le papier, je trouve que c’est déjà plus intéressant de deviner une profession ou un hobby, plutôt que l’âge ou le statut marital d’une personne. Je pense que c’est moins monotone, dans la mesure où les professions et loisirs existant(e)s peuvent être vraiment divers et variés ; là où, dans ma tête, on ferait le tour du concept beaucoup plus rapidement avec des critères comme l’âge ou les couples. Mais bon, à nouveau, c’est dans ma tête ; et si ça se trouve, je serais agréablement surpris par la mise en pratique, si elle trouvait un moyen de proposer une mécanique diversifiée.
Dans l’exécution, en revanche… je vais avoir quelques problèmes.
En fait, quand je dis que je ne suis pas très fan des jeux qui fonctionnent à l’intuition, c’est parce que… comme le mot « intuition » l’indique, les propositions des candidats ne reposent pas sur du concret ; aussi, j’aurai toujours cette impression d’assister à quelque chose d’assez hasardeux.
Bon, je reconnais que c’est très personnel, cela dit. Après tout, j’imagine que si des jeux de société comme Les loups-garous de Thiercelieux sont aussi populaires, c’est parce que beaucoup de joueurs y trouvent leur compte. Personnellement, c’est un jeu qui a vraiment fini par m’ennuyer et perdre en intérêt à mes yeux, dans la mesure où j’avais l’impression de quasi-systématiquement voter au hasard, surtout quand on est en possession d’un rôle pas très palpitant…
Mais sinon, oui, ce sera toujours un problème que j’aurai avec les jeux dont le concept repose sur ce genre de ficelles.
Certes, l’intuition est à différencier du hasard, dans la mesure où elle est basée sur une conviction intime, et non sur un tirage au sort. Par exemple, dans A prendre ou à laisser, beaucoup de candidats penseront qu’une boîte en particulier fera leur bonheur, et le choix de celle-ci se basera plus souvent sur une intuition que sur le hasard pur.
En revanche, concrètement… j’ai envie de dire que ça ne change pas spécialement grand-chose. Surtout quand on est spectateur.
Aussi, pour en revenir à QEQ, même si le but des deux premières manches sera d’affiner les hypothèses des candidats, leurs premiers choix se feront forcément à l’intuition, étant donné qu’ils n’auront aucun indice dès le départ.
Et à ce niveau-là… à part se dire « Ah, lui, il a certainement la tête de l’emploi » et fonctionner au faciès (ce qui passait sans doute plus facilement dans les années 90 qu’aujourd’hui), je ne vois pas trop comment fonder ses premières hypothèses autrement qu’en faisant des associations spécialiste/spécialité par hasard.
Mais parlons plus en détail des différentes manches, afin de voir comment les choix des candidats vont s’affiner.
Manche 1 : Les paris
Dans cette manche, les six spécialités proposées seront traitées tour à tour par les candidats.
Le premier candidat va dire quel spécialiste lui semble le plus apte à exercer cette spécialité, puis pronostiquer un nombre de points en jeu, selon sa certitude.
L’animatrice pose alors une question en rapport avec la spécialité au spécialiste choisi. Si celui-ci répond correctement, le candidat remporte le nombre de points qu’il a misé ; sinon, il les perd.
Chaque candidat passe deux fois durant cette manche ; toutefois, afin de ne pas trop être pénalisé par le déroulement et les choix des candidats précédents, leur ordre de passage se fera ainsi : 1er – 2e – 3e – 3e – 2e – 1er.
Oui, autrement, si on avait gardé le même ordre de passage pour les deux questions de chaque candidat, le premier aurait été bien trop avantagé par rapport au troisième, l’un ayant un boulevard dans ses choix de pronostics et l’autre devant alors se contenter de prendre ce qu’il lui reste.
Une solution qui fait un peu rustine sur les bords et ne corrige pas totalement le problème de base, mais qui reste un compromis acceptable.
Outre le problème de choix à l’intuition, on a également un problème plus ponctuel qui peut survenir pour certains thèmes un peu trop spécifiques, ou qui se prêtent moins bien à de la théorie.
Par exemple, il est déjà arrivé que pour le thème “Goûteur d’eau”, on pose la question : “De quel pourcentage d’eau le corps humain est-il constitué ?”. Euh… rassurez-moi, il n’y a pas que moi qui trouve ça hors sujet ? Parce que, d’une part, ça relève davantage de la culture générale qu’autre chose ; et d’autre part, même en n’exerçant pas ce métier, j’ai vraiment du mal à voir en quoi cette information est primordiale dans ce cadre-là. Ce serait comme demander à un garagiste quelle était la marque de la voiture de Starsky et Hutch, il n’a pas besoin de connaître cette information ni même la série pour exercer son métier !
Par conséquent, est-ce que c’est parce que la production avait du mal à imaginer une question plus pertinente et/ou accessible, qu’elle est partie là-dessus ? Ça n’aurait pas été gênant de poser une question plus technique, d’autant plus pour un jeu dont le but est de déterminer le spécialiste du thème. Par exemple : “Quel terme désigne l’état d’un liquide trouble ?”, qu’un goûteur d’eau doit certainement connaître, puisque tester la turbidité de ce qu’ils goûtent fait partie des fonctions requises.
Mais bon, ça reste un exemple relativement isolé. Je n’ai évidemment pas souvenir de tout ce que j’ai vu dans les années 90 pour savoir si c’était aussi fréquent que ça ; mais ça montre que par moments, la production peut manquer un peu de rigueur dans la rédaction de ses questions.
Manche 2 : Les défis
Durant cette manche, les candidats vont, à nouveau, devoir traiter les six spécialités dans l’ordre proposé, en choisissant le spécialiste qui leur paraît le plus apte à y répondre ; mais cette fois-ci, les spécialistes ne devront pas se contenter de répondre à une question, et devront cette fois-ci mettre la main à la pâte.
Une fois le spécialiste choisi, le défi est lancé. On installe un décor et des accessoires afin de pouvoir mettre en scène la spécialité en cours, et celui qui a été choisi commence à jouer le rôle qui lui est demandé, pendant quelques minutes.
Une fois la prestation réalisée, on demande aux membres du public de voter, pour savoir si celui-ci l’a jugée convaincante ou non.
Puis les résultats sont révélés : évidemment, plus le pourcentage de membres du public convaincus est élevé, plus le candidat sera confortable dans son score.
Bon, là, théoriquement, les candidats font des choix un peu plus fondés qu’en manche 1, puisqu’ils ont un peu plus d’indices qu’en tout début de jeu. Mais bon, ça reste toujours très théorique, je vous renvoie à ce que j’ai dit à ce sujet lors de la manche 1.
Mais puisqu’on parle de théorie, cette manche 2 est surtout l’occasion de faire une mise en pratique ; et c’est nettement plus intéressant que de juste répondre à une question comme en manche 1. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que cette manche 2 était très facilement ma préférée quand j’étais enfant, et que la manche 1 m’ennuyait.
Cela dit, est-ce que ça permet de mieux jauger les aptitudes des spécialistes que les questions théoriques de la manche 1 ? Oui… mais pas encore totalement non plus. En fait, ça dépendra notamment des spécialités en jeu, et de la façon dont on les met en scène.
Bon, pour pas mal d’entre elles, il n’y a pas d’ambiguïté : par exemple, si la spécialité est « Je peux boire deux litres d’eau en dix secondes », on voit tout de suite si le spécialiste désigné y arrive ou non. Idem pour une spécialité « Fakir », puisqu’en dehors du vrai spécialiste, personne d’autre ne va se risquer à monter comme ça sur une planche à clous… Et à moins que le spécialiste non-attitré se soit découvert un nouveau talent en live et parvienne à mystifier le public, on peut dire avec certitude qu’untel est bien le spécialiste du sujet.
Pour le reste, en revanche, c’est un peu plus variable ; mais, quelque part, c’est aussi ce côté-là qui fait l’intérêt du vote du public. Après tout, si chaque cas de figure devait concrètement se solder par des 0% ou des 100%, ça deviendrait assez planplan, n’est-ce pas ?
Cela dit, à l’instar de la manche 1, ça peut arriver que quelqu’un puisse suffisamment se débrouiller sur une spécialité pour faire illusion… sans que ça ne relève d’une compétence vraiment professionnelle.
Par exemple, j’ai souvenir d’un défi sur le thème « Comptable », qui avait été mis en scène façon Juste Prix, où le spécialiste devait associer le bon taux de TVA à chaque produit proposé. Alors, oui, un professionnel du domaine saura très certainement résoudre cet exercice sans problème ; cependant, il n’y a pas forcément besoin de l’être non plus, avoir une culture générale suffisamment large suffit.
Notons au passage que pour certains défis, le spécialiste désigné doit l’exercer durant une période indéfinie, voire durant toute la manche ; aussi, lorsque ça arrive, les défis en question sont proposés en premier.
Par exemple, si une spécialité « Apnéiste » est proposée, on envoie le spécialiste s’immerger lors du lancement du défi ; mais celui-ci reste en arrière-plan, et l’émission continue avec le défi suivant. Le défi de l’apnéiste prend alors fin lorsqu’il sort de l’eau, et on demande au public de ne voter qu’à ce moment-là.
Autre exemple : pour un défi « Go-go dancer », davantage axé endurance, on va demander au spécialiste désigné de danser dans un coin du plateau tout au long de la manche 2 ; et on demandera au public de voter sur sa prestation seulement à la fin de celle-ci.
Je suis légèrement mitigé sur ces défis-là. D’un côté, je reconnais que certaines spécialités se prêtent davantage à une durée indéterminée ; et en outre, j’aime bien le fait de jouer avec la formule, en proposant de temps en temps une structure moins habituelle. De l’autre, en revanche, ça monopolise potentiellement un spécialiste durant toute la manche ; et ça demande aussi au public de rester attentif à la prestation tout du long, y compris pendant que les autres spécialités sont jouées.
A l’issue de la manche, on dévoile la moyenne des votes du public pour chaque candidat. Celui qui a la moyenne la plus élevée part en finale.
La finale
Le candidat finaliste se lève de son fauteuil, et dispose de 30 secondes pour attribuer les différentes spécialités aux différents spécialistes. Ceux-ci restent installés dans les canapés, c’est le candidat qui doit se déplacer pour leur distribuer les spécialités correspondantes.
Spécialités qui prennent la forme d’accessoires en lien avec celles-ci (par exemple, un stéthoscope pour un médecin) durant les première années de l’émission ; avant d’être remplacées par des bulles indiquant textuellement les spécialités lors des dernières saisons.
Une fois cette distribution effectuée, les spécialistes partent s’installer dans des cabines, chacune correspondant à une spécialité.
L’animatrice interroge alors les spécialistes un à un, pour leur demander s’ils sont bien les spécialistes correspondants. Si c’est le cas, la cagnotte du candidat monte ; sinon, on referme le rideau. Si le candidat ne fait pas de sans-faute, on révèle à la fin les spécialités qui n’ont pas été attribuées correctement.
Pour un spécialiste identifié, le candidat gagne 1000 F ; et pour chaque nouveau spécialiste identifié, il double le montant de sa cagnotte. Sauf s’il fait un sans-faute, auquel cas il remporte 20 000 F.
Notons toutefois que si le candidat n’a pas eu le temps d’attribuer l’ensemble des spécialités aux spécialistes, le(s) spécialiste(s) orphelins resteront sur le canapé, et le candidat ne pourra donc pas remporter le montant maximum en jeu (même s’il ne lui restait qu’un spécialiste, et qu’il avait fait un bon pronostic sur les cinq autres). Il est donc possible de remporter 16 000 F au lieu de 20 000 F en identifiant cinq spécialistes correctement, si le candidat n’a pas eu le temps de remettre l’accessoire manquant au dernier.
Je n’ai pas grand-chose à dire sur ce format de finale, qui est tout simplement la conclusion logique du jeu, et qui fait bien le café à ce niveau-là.
Après, oui, je pourrais éventuellement critiquer la mise en scène, dans la mesure où le principe de cette finale n’implique pas forcément de faire courir le candidat dans tous les sens en le faisant stresser gratuitement. Il aurait tout aussi bien pu rester confortablement assis dans son fauteuil, et dire oralement à quel spécialiste il attribuait quelle spécialité…
Cela étant, ça aurait sans doute été beaucoup moins fun à regarder, et aurait moins appuyé le point suivant…
L’ambiance !
Oui, je vous rassure, en dépit de tout le négatif que j’ai pu dire jusqu’à présent, le but de cette critique n’était pas de défoncer le jeu.
Aussi, parlons à présent de ce qui me plaît le plus au sujet de Qui est qui ? : son ambiance ! Hé oui, elle me hype toujours autant, même 20 ans plus tard. J’espère que je ne vous ai pas trop fait peur en vous laissant penser que je n’aimais plus du tout ce jeu une fois passé à l’âge adulte…
Déjà, l’émission met bien dans le bain dès le départ, en démarrant par le générique LE PLUS ENTRAÎNANT AU MONDE ! Eh oui, générique d’Attention à la marche, tu t’es bien battu, mais ça ne s’est pas joué à grand-chose.
Et puis, au moins, QEQ continue à me happer une fois le générique terminé, ce qui n’est pas le cas d’AALM et de son ambiance un peu trop beauf.
De façon générale, on sent que la production tient à proposer un programme réalisé de façon péchue, qui soit dynamique et vivant.
Ainsi, on a une émission restant rythmée et sans temps mort, on fait souvent appel à des intermittents, des jeux de lumière intéressants, et des effets sonores pour dynamiser un peu le tout. Et quand un candidat remporte le gros lot, les techniciens s’en donnent à coeur joie pour le vaporiser avec un spray à serpentins… euh… mouais.
Oui, bon, cette façon d’ambiancer ne fait pas toujours totalement mouche non plus. Par exemple, je me serais également passé de l’effet sonore un peu cartoonesque qu’on met lorsqu’un candidat est éliminé, pendant que son fauteuil recule en arrière. Mais les exemples de ce genre restent globalement assez mineurs.
Et, oui, je n’en avais pas parlé à ce moment-là car je comptais le faire plus en détail ici : mais le concept de la manche 2 va totalement dans ce sens-là. Car l’un des buts recherchés par cette mécanique, c’est aussi de divertir, de par la mise en scène et les « performances » des spécialistes.
Soulignons au passage que cette manche 2 se donne les moyens, et n’hésite pas à mettre à disposition des décors pour rendre les défis plus immersifs, des accessoires afin de pouvoir les réaliser, et l’intervention de Pépita et Guy Lecluyse lorsqu’il y a besoin d’interlocuteurs. Parfois, c’est même carrément le public qui est mis à contribution : ainsi, pour une spécialité « Serveur en boîte de nuit », on fait carrément descendre le public sur le plateau pour danser en conditions !
A ce niveau-là, les défis minimalistes se font un peu plus rares. Généralement, il s’agit de ceux du type « Je suis fan d’un chanteur/d’une chanteuse », où on a juste un technicien qui apporte les paroles d’une chanson au spécialiste choisi afin qu’il puisse l’interpréter.
Et puis, on ne va pas se le cacher, le moment où les spécialistes exécutent le défi auquel ils sont assignés est clairement le moment qu’on attend le plus lors du visionnage, car c’est très souvent le plus fun.
Ce qui fait que j’apprécie autant le divertissement de ce jeu, c’est le fait qu’il n’est pas « forcé », comme c’est malheureusement trop souvent le cas dans les jeux qui se veulent ambiancés. Ainsi, pour amuser la galerie, c’est courant d’avoir un animateur qui part en roue libre (façon QLMG), des questions/réponses volontairement stupides (façon QLMG à nouveau), des people qui font des vannes (façon TLMASMAD) en ne servant parfois à rien d’autre (façon SVUBE version 1), des happenings intrusifs (façon TLMVPSP version Jarry)… etc. Bref, des éléments non conceptuels, qui à mes yeux font plutôt diversion pour attirer l’attention du spectateur qui jugerait le jeu trop ennuyeux autrement (du moins selon les producteurs…). On peut s’en sortir en choisissant cette voie-là, comme le fait APOAL (où l’ambiance développée n’est pas corrélée à la mécanique de jeu), mais ça reste un exercice assez difficile et trop peu souvent réussi à mes yeux.
Mais ici, QEQ serait davantage à rapprocher d’un jeu comme Catchphrase, dans la mesure où c’est vraiment le concept lui-même qui est amusant et divertissant. Ici, en l’occurrence, c’est le fait de voir comment s’en sortent des gens qui ne sont pas forcément familiers avec l’exercice demandé ; ce qui donne des situations et des réactions très spontanées.
Et, surtout, il n’y a aucune intention mesquine derrière. Le but n’est pas de se moquer des spécialistes en les montrant rater quelque chose. Ceux-ci se sont portés volontaires pour jouer, sont conscients de leur rôle dans l’histoire, et font le plus souvent preuve d’autodérision. A ce niveau-là, ce que l’émission a intérêt à réussir, c’est le casting de ses spécialistes, afin de pouvoir offrir de bonnes réactions.
Bon, ce n’est cependant pas totalement parfait non plus, dans la mesure où ça arrive aussi d’avoir parfois des prestations un peu gênantes. Par exemple, si la spécialité en cours est « Je parle grec », et que le spécialiste choisi n’est pas le bon, se retrouvant à baragouiner quelque chose qui ressemble vaguement à du grec à ses yeux… ça peut être un peu embarrassant.
Aussi, lorsque la production le juge nécessaire, elle peut envoyer un jingle sonore mettant fin au défi, même si celui-ci n’était pas terminé, afin de ne pas rester dans l’embarras trop longtemps.
J’ai envie de dire que ça fausse quand même un peu le vote du public, dans la mesure où ça envoie implicitement le message comme quoi le candidat n’a pas choisi le bon spécialiste… mais d’un côté, on a bien vu que l’intérêt de cette émission n’était de toute façon pas la solidité de sa mécanique ; et de l’autre, je pense que le public votant n’a pas besoin d’un signal précis pour se rendre compte qu’une performance a été globalement ratée. D’ailleurs, le public ne met pas automatiquement 0% lorsque ça arrive, comme quoi tout le monde continue à voter en son âme et conscience.
Après, je ne cache pas non plus qu’il y a sans doute le côté « enfant des années 90 » qui joue un peu dans mon appréciation de l’ambiance ; et que, même si je la trouverais sans doute toujours assez prenante proposée telle quelle aujourd’hui, tout ne passerait peut-être pas non plus (un peu comme une partie de l’humour de L’or à l’appel), comme la représentation de certains stéréotypes de temps à autre ; et peut-être qu’il faudrait en lisser une partie pour que le format continue à tenir la route aujourd’hui.
Ce qui a probablement déjà été fait dans les quelques héritiers spirituels de QEQ qui ont été faits depuis… mais dont je ne pourrai pas dire grand-chose, ne les ayant pas vus. Le premier me venant à l’esprit étant Identity, diffusé par TF1 vers la fin des années 2000 et présenté par Jean-Luc Reichmann (mêh.) ; le second étant Game of talents, diffusé par TF1 à partir du début des années 2020, lui aussi présenté par Jean-Luc Reichmann (re-mêh.) depuis que son ancien animateur, à savoir Jarry (méga-mêh.), a rejoint France 2. Bon, au-delà des incarnations des programmes qui ne m’ont suscité aucun enthousiasme (comme vous avez pu le constater…), il y a aussi le fait que ce sont des formats de prime-time impliquant des people qui m’a dissuadé de m’y intéresser. Et à ce titre, je crains justement que ces formats soient plus propices à tomber dans les écueils de divertissement que QEQ avait su éviter…
Même si, pour être honnête, QEQ avait lui aussi connu ses déclinaisons en prime, avec des people aussi bien en tant que candidats qu’en tant que spécialistes (qui échangeaient leurs rôles en cours de route). Mais bon, je n’ai rien contre ce genre de déclinaisons, du moment qu’elles viennent compléter la diffusion régulière, et non la remplacer (ce qui a malheureusement fini par arriver à Catchphrase, puisque j’en parlais tout à l’heure…).
Total : 13/20
Si j’avais dû juger Qui est qui ? sur un plan purement conceptuel, par rapport à la solidité de sa mécanique, je pense que ce jeu aurait difficilement eu la moyenne. Le concept reste assez hasardeux dans son essence même ; et sa mise en pratique l’est presque tout autant, avec deux manches permettant de déterminer les spécialités qui reposent majoritairement sur des choix assez arbitraires, et renvoyant parfois des éléments de jeu qui ne prouvent pas grand-chose. De fait, le jeu fonctionnant majoritairement à l’intuition, c’est difficile pour les candidats d’avoir une quelconque certitude de pouvoir gagner. Je pense toutefois qu’au vu de son principe, ça aurait été compliqué pour l’émission de proposer quelque chose de beaucoup plus solide.
Néanmoins, je ne peux pas nier que ce programme a su mettre les moyens nécessaires à disposition pour mettre en œuvre ce fameux concept ; et qu’à défaut d’être solide, il n’en demeure pas moins très divertissant, et ce d’une façon très naturelle, ce qui le rend très pêchu et sincèrement plaisant à regarder.
Ce qui arrive à compenser les lacunes que je peux avoir avec cette mécanique ; et compte tenu de mes préférences téléludiques habituelles, ce n’est clairement pas rien de sa part ! Dans la mesure où les concepts qui arrivent à me happer uniquement via leur divertissement sont assez rares, je peux donc dire que Qui est qui ? arrive à accomplir un petit exploit.
Bref, même si je ne le trouve plus aussi génial que du haut de mon enfance/pré-adolescence, ce jeu parvient toujours à me happer positivement et ne reste pas sans mérite.
Reste toutefois à savoir ce que va donner mon appréciation d’un jeu basé sur l’identification de parfaits inconnus, sans être passé par la case “Enfance/adolescence” pour m’en forger des bons souvenirs… réponse la prochaine fois.