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#010 – Un contre tous

Dans beaucoup de jeux, les candidats s’affrontent d’une manière « symétrique », dans la mesure où ils partent tous sur un certain pied d’égalité. Par exemple, dans Questions pour un champion, aucun candidat n’a de statut particulier qui l’avantage ou le désavantage par rapport aux autres. Il y a certes le champion, mais sa seule particularité est d’avoir une cagnotte personnelle ; pour le reste, il n’est pas favorisé par les règles, et doit quand même enchaîner 9 points gagnants4 à la suite et Face à face comme tout le monde.
Et jusqu’ici, on a eu l’occasion de voir un type de jeu où l’affrontement se fait de manière « asymétrique », avec cette fois-ci des candidats avantagés par un certain statut… et vous devez à présent vous douter que je n’aime pas du tout cette façon de faire, vu les très mauvaises notes que j’ai pu donner à Tout le monde veut prendre sa place et à Trouvez l’intrus. Je pourrais aussi parler de Questions pour un super champion et du Grand Slam, où je n’aime pas non plus l’idée qu’un super champion puisse carrément zapper une partie du jeu…

Mais il y a un autre moyen de rendre l’affrontement entre candidats « asymétrique » que de fourrer des champions suravantagés à tout-va ; et c’est celui que nous allons voir avec les jeux que je vais aborder, dans les deux critiques à venir : l’affrontement entre un candidat et un panel.
Et, premier arrivé premier servi, on va donc commencer par le premier à être arrivé à l’antenne (… du moins, pour ce dont je me souviens) : Un contre tous, diffusé éphémèrement sur France 3, durant l’été 2005, à 13 heures, présenté par Vincent Perrot.

La mécanique d’affrontement

Dans Un contre tous, nous avons un candidat, qui devra en affronter 70 autres. Le but du candidat seul sera d’éliminer les 70 autres ; le but des 70 autres sera de subsister pour pouvoir remporter quelque chose et empêcher le candidat seul de remporter le gros lot.
A partir de maintenant, je désignerai le candidat seul par « le candidat » et les 70 autres par « le panel » ou « le public ».


Le candidat peut quand même compter sur le « soutien » de l’animateur.

Le jeu comporte 10 questions (avec 3 propositions de réponse) auxquelles répondre. Pour chaque question, le candidat et le panel disposeront de 7 secondes pour répondre ; puis la réponse du candidat est dévoilée. Ensuite, on voit combien de membres du panel sont éliminés suite à cette question.
Le candidat et le panel ne sont en effet pas traités de la même manière : en effet, si un membre du panel répond incorrectement à la question, il est éliminé ; si le candidat répond mal, il ne l’est pas. Mais, en contrepartie, non seulement il ne remporte pas l’argent mis en jeu par la question ; et, de plus, un membre du panel qui a été éliminé revient dans la compétition (sauf pour la dernière question, où aucun candidat ne peut être repêché).

Les trois premières questions permettent de remporter 100 euros ; les questions 4 à 6, 200 euros ; les questions 7 à 9, 400 euros ; et la question 10, 500 euros.
Cet argent sert à faire monter le montant d’une cagnotte. A la fin de l’émission, celle-ci sera remportée :

  • soit par le candidat, s’il a réussi à venir totalement à bout du panel ;
  • soit par le panel, s’il reste au moins un membre actif de celui-ci à l’issue de la dernière question. La cagnotte est alors remportée par les membres encore en lice, et ceux-ci se la partagent.

Si le candidat ne parvient pas à éliminer tout le monde, il remporte toutefois 10 euros par membre du panel qu’il a réussi à éliminer.


Affichage d’une question : on voit son numéro, son enjeu, et les trois thèmes proposés.

Les outils dont dispose le candidat

Pour que le candidat puisse atteindre son objectif de pouvoir éliminer ses 70 concurrents en 10 questions, il aura quelques avantages.

Déjà, pour commencer : le choix des questions.
Pour les six premières questions, le candidat a le choix entre trois thèmes, derrière lesquels se cachent une question en rapport. Pour les quatre dernières questions, il n’y a pas de thème, le candidat choisit directement parmi les trois questions proposées.
En outre, Vincent Perrot donne, à titre indicatif, quelques professions représentées dans le panel, ce qui peut donc aider le candidat à faire son choix.

Le candidat disposera également d’un joker, le « Blik » (… ne me demandez pas pourquoi il s’appelle comme ça, j’imagine qu’il fallait lui trouver un nom), disponible à partir de la quatrième question, qu’il pourra utiliser sur n’importe quelle question par la suite.
Cet outil permet, dans un premier temps, de voir ce que le panel a répondu à la question. Puis, en connaissant le résultat, le candidat a le choix entre maintenir sa réponse, changer de réponse, ou bien changer de question. Ce qui a plusieurs avantages : potentiellement lui garantir une meilleure occasion de faire monter sa cagnotte, s’il n’est pas sûr de sa réponse à la base ; et changer de question, s’il estime que trop peu de membres du panel risquent d’être éliminés dessus.


Bon, là, c’était un cas de figure où tout le public avait été éliminé ; donc, forcément, on a du zéro partout… mais le candidat peut quand même changer de réponse ou de question.

Bref, on donne tout de même quelques outils au candidat, ce qui donne une mécanique de jeu globale plutôt satisfaisante… enfin, à quelques détails près.

La petite faille de cette mécanique de jeu

Pour gagner, le candidat doit éliminer l’intégralité du panel en 10 questions… mais quid si un membre du panel résiste encore et toujours, en décidant de ne jamais répondre faux aux questions, malgré tous les efforts déployés par le candidat pour qu’il n’y parvienne pas ?

On a donc un léger problème avec cette mécanique, avec un cas de figure où, théoriquement, un candidat peut ne pas gagner le gros lot, pour des circonstances indépendantes de sa volonté…
Pire : dans un scénario théorique idéal, si tous les membres du mur étaient restés présents à la fin, le candidat n’aurait rien pu gagner, quand bien même celui-ci aurait été très performant tout du long…
J’entends bien qu’on a tout de même donné quelques outils au candidat pour qu’il puisse éliminer un maximum de gens… mais malgré cela, ceux-ci ne sont pas une garantie de pouvoir éliminer tout le monde. Et pour cause : le nombre de questions reste fixe pour chaque émission, donc au bout de la dixième, il faut forcément désigner un vainqueur par défaut. Et ce vainqueur par défaut… c’est le panel.
Bref, en dépit des outils dont le candidat dispose, la balle reste théoriquement dans le camp du panel.

Donc, à l’instar de la version maestro de N’oubliez pas les paroles ou de TLMVPSP, on se retrouve avec une mécanique globale où le scénario « impossible de battre la concurrence à cause d’une règle mal pensée » peut se produire…
Et c’est d’ailleurs quelque chose qui me gêne un peu avec les jeux « asymétriques » de façon générale, qui assument la différence de statut entre les candidats, et qui ne prévoient pas de mécanique plus élégante pour départager les cas litigieux. Je reconnais néanmoins que dans le cas de Un contre tous, ça aurait été plus difficile de prévoir un scénario pour éviter ce genre de cas.

Mais bon, en pratique, ce n’est pas aussi gênant que j’en donne l’impression.
D’une part, car, si le candidat ne parvient pas à éliminer tout le monde, il gagne tout de même un montant proportionnel au nombre de gens qu’il a réussi à faire sortir (10 euros par personne éliminée). Ce qui rend tout de même ses efforts méritoires, et ça reste un lot de consolation tout à fait acceptable, là où NOPLP et TLMVPSP ne se donnent même pas cette peine…
D’autre part, même si c’est théoriquement possible, ça n’arrive bien évidemment jamais que les 70 membres du panel ne fassent un sans-faute du début à la fin… donc, quoi qu’il arrive, on évite le scénario ultra frustrant. A moins de donner des questions vraiment trop faciles, mais bon… (remarquez, dans 1 contre 100, une grande partie du mur a été éliminée sur une question où on demandait la couleur obtenue par le mélange de deux couleurs primaires, comme quoi…)

Ca n’empêche toutefois pas le problème d’avoir un candidat qui ne peut pas faire le meilleur score à cause de circonstances indépendantes de sa volonté… mais ça permet de l’atténuer d’une façon pas trop frustrante.


Après chaque question, l’écran central nous révèle le nombre de membres du panel encore en lice.

Les gains… mouais.

Cela étant, je vous avoue que la relative faiblesse des gains mis en jeu atténue également un peu le point précédent.
Bon, forcément, case horaire et France 3 obligent, le budget n’est pas particulièrement élevé, ce qui n’est pas forcément un défaut en soi… mais ça le devient un peu quand le concept prend de l’intérêt avec des sommes plus fortes.

Déjà, pour rappel, les questions valent chacune de 100 à 500 euros, soit un montant total théorique de 2 600 euros, si le candidat fait un sans-faute.
Si le candidat parvient à éliminer tout le monde, il remporte cette cagnotte. Vu le montant maximal mis en jeu, ça va, ça reste honorable.
S’il reste des membres du panel encore en lice, en revanche, ce sont eux qui vont se partager le montant de la cagnotte. Et là… ça peut être un peu plus embêtant, puisque plus il y aura de « survivants », moins ils vont remporter d’argent… or, vu que les sommes mises en jeu ne sont déjà pas particulièrement élevées, imaginez donc si une vingtaine de candidats doivent se partager un montant de l’ordre de 1 000 euros, ça ne leur fera vraiment pas grand-chose… et même le candidat remporterait largement plus qu’eux au final (avec 10 euros par personne éliminée, il gagnerait dans l’ordre de 500 euros pour une vingtaine de membres du panel encore en lice).

En fait, j’expliquais tout à l’heure que la mécanique globale faisait en sorte que la balle était dans le camp du panel, puisque c’était celui-ci qui avait le dernier mot… mais, finalement, sa situation n’est pas forcément avantageuse non plus, dans la mesure où trop de bons éléments dans celui-ci diminue également les chances de chacun de ses membres de gagner gros.
Bref, malgré ce que j’ai pu dire, le rôle du candidat reste quand même le plus enviable.

Après… selon la façon dont on le perçoit, on peut considérer le panel soit comme un ensemble de candidats qui est là pour jouer, soit juste comme un public auquel on a donné une fonction plus interactive, avec des bonus potentiels à la clé.
Donc j’imagine que si on perçoit le panel de cette seconde façon, on se sentira moins frustré par la faiblesse de leurs gains potentiels.
En outre, là encore, en pratique, ce n’est pas non plus monnaie courante qu’autant de membres du panel ne restent présents à la fin. Tant qu’on reste sur un échantillon qui ne dépasse pas 10 personnes, ça peut encore rester acceptable.

L’ambiance… France 3, je ne te reconnais pas !

Pour finir, un mot sur l’ambiance du jeu… qui est plutôt déroutante, quand on a l’habitude des jeux de France 3 !
Déjà, ça doit être très facilement l’un des jeux les plus animés que cette chaîne a eu l’occasion de connaître. Même si on est encore assez loin d’une ambiance à la TF1 à ce niveau-là (ça, ce sera pour la critique suivante), le panel est très actif pour réveiller tout le monde.
En fait, on sent que tous ses membres sont « chauffés » pour mettre l’ambiance, en s’opposant activement au candidat. Il faut avouer qu’un public qui souhaite que le candidat perde, on ne voit pas ça tous les jours dans les jeux TV…
Ainsi, chaque mauvaise réponse du candidat est applaudie (… ce qui n’est pas forcément une bonne chose pour le panel, puisque la cagnotte ne monte pas le cas échéant…) ; lorsqu’on révèle le nombre de membres du panel encore en course, celui-ci acclame les manches où peu d’entre eux ont été éliminés, et hue celles qui ont plutôt été des hécatombes pour lui ; et à la fin du jeu, même s’il n’y a plus qu’un seul membre qui représente le panel, celui-ci le soutient activement et se réjouit lorsqu’il gagne (… même si les 69 autres n’ont rien à y gagner, mais bon).


On la ressent, la confrontation entre le panel et le candidat.

Enfin, pour information, ce jeu avait été tourné sur le plateau de la version belge, nommée Septante et un, dont Un contre tous est adapté. D’ailleurs, ce jeu est un véritable succès en Belgique, toujours présent à l’antenne 15 ans plus tard (et adapté depuis la crise Covid, en faisant « télétravailler » le public).
Au passage, puisqu’on parle de Septante et un, je trouve ce titre belge très bien trouvé. Il joue subtilement à la fois sur le nombre de candidats, mais également sur le fait que l’un d’entre eux en particulier se démarque de tous les autres. On peut effectivement comprendre « Septante et un » comme « 71 », mais aussi comme « 70 + 1 ». Et, oui, malheureusement, en France, comme on se démarque en disant « Soixante-dix » à la place de « Septante » et « Soixante-et-onze » à la place de « Septante et un »… forcément, on ne pouvait pas garder ce titre tel quel, à moins de réduire le nombre de candidats à maximum 61. D’où notre titre un peu plus passe-partout.

Bref. Vu les moyens mis en œuvre, on comprend que France 3 n’avait pas forcément le budget pour en construire un, ou ne souhaitait pas prendre trop de risques. Peut-être l’aurait-elle fait si ce jeu avait eu du succès par la suite, mais bon…
Car le plateau est quand même assez grand, étant donné qu’il fallait disposer 70 sièges pour le public, avec un écran chacun, dans une disposition qui n’est pas sans rappeler un amphithéâtre de faculté. Avec quand même une ambiance plus cool, avec des tons bleutés. Et une musique d’accompagnement qui fait bien le job, qui meuble bien les phases de réflexion, qui gère bien le suspense, mais le tout d’une façon pas trop grandiloquente.

Total : 12,5/20

Un contre tous est un jeu qui vaut vraiment le coup d’œil. Sa mécanique d’affrontement a certes quelques défauts, mais elle est plutôt intéressante, bien rythmée, et avec ses quelques surprises et rebondissements tout le long du jeu.
Au final, au-delà de sa case horaire défavorable, peut-être que ce jeu n’était pas trop dans l’ADN de France 3, et aurait pu mieux convenir à France 2… mais j’apprécie qu’on ait eu une tentative d’importation de ce concept en France, et je garde plutôt un bon souvenir de ce qu’on a pu en voir. En outre, la version belge permet de continuer à se satisfaire du concept.

Néanmoins, comme dit en intro, ce ne sera pas le seul jeu du genre qu’on verra sur les chaînes françaises… mais ça, on en parlera dans l’article suivant !

garsiminium

Enchanté, moi c'est garsim. Bienvenue sur mon blog, où je parle de différents sujets, légers comme moins légers.

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