S’il y a bien un cliché que je déteste dans les jeux d’aventure, c’est l’épreuve où il faut manger des choses volontairement peu ragoûtantes pour gagner.
Alors bon, je pense que je ne suis pas le seul dans ce cas-là, et que pas mal de spectateurs redoutent le moment où ça arrive… mais le plus souvent, c’est plutôt pour des raisons de dégoût, d’estomac fragile etc. Bon, dans un sens, c’est un argument valable, mais on pourrait aussi l’appliquer à des épreuves animalières où les candidats doivent manipuler des araignées et des serpents, pour des spectateurs arachnophobes ou ophiophobes. Et de façon générale, pour n’importe quelle épreuve mettant en scène une certaine phobie à laquelle on est réceptif.
Personnellement, je ne suis pas spécialement réceptif aux phobies que l’on montre à l’écran, mais ça ne m’empêche pas d’être irrité par les épreuves de dégustation, pour des raisons différentes.
Déjà, commençons par préciser qu’à une époque (avant 2013 pour être précis… oui la date a une importance, j’y reviendrai), c’était le genre d’épreuve qui ne me faisait ni chaud, ni froid. Oui, je comprenais vaguement l’intérêt de ce genre d’épreuve, parce que ça demandait aux candidats de se surpasser, tout en ayant un côté divertissant pour le spectateur, amusé par la tronche qu’ils peuvent tirer… et clairement, c’est pour ça que ce genre d’épreuve est aussi répandu.
Ajoutons à ça un alibi culturel pour les émissions qui peuvent se le permettre, comme Pékin Express qui traverse différents pays et qui en profite pour montrer de la gastronomie locale. Personnellement, je trouve ça légèrement insultant pour la gastronomie locale vu l’objectif assumé par ce genre d’épreuve (divertir le spectateur en voyant les candidats dégoûtés), mais passons.
Bref, ça, c’était avant que Fort Boyard ne me donne une raison de haïr ce genre d’épreuve.
Oui, Fort Boyard. Il y avait une époque où ce jeu se démarquait par l’absence quasi-totale d’épreuve de dégustation (bon, mis à part un passage de vingt secondes dans la Tête chercheuse et une épreuve de 1990 que tout le monde a oubliée, mais ça reste très mineur), et je trouvais ça très reposant. Très reposant de voir un jeu d’aventure qui parvenait tout à fait à se passer de ce cliché, et à divertir de façon moins rentre-dedans.
Mais ça, c’était avant que le programme ne devienne une sombre merde insultante, pour diverses raisons qui feront très certainement l’objet d’un autre article. Et les épreuves de dégustation y ont très activement contribué. J’irais même jusqu’à dire que c’est l’un des éléments les plus symptomatiques du mal-être de ce jeu depuis la décennie 2010.
Car voyez-vous, en 2013, est apparu un certain personnage devenu « culte » pour certains (sincèrement, à chaque fois que quelqu’un me dit que Willy Rovelli est un personnage culte de ce jeu, j’ai l’impression de me prendre un coup de pied dans les burnes tant ce personnage est une insulte à cette émission.), accompagné de sa propre épreuve, qui consistait justement à faire manger aux candidats des spécialités peu ragoûtantes.
Mais au départ, ça restait encore assez soft : on voyait les spécialités telles quelles, les candidats devaient les manger, point. Le personnage amusait un peu la galerie, voilà.
Sauf que le personnage ayant gagné en popularité (et un nouveau coup de pied dans les burnes pour moi…) et le concept de l’épreuve plaisant à autant de gens pour les raisons » » « comiques » » » (car visiblement, le public n’avait jamais vu une épreuve de dégustation avant ça, alors que pas mal d’autres jeux avaient déjà expérimenté ce genre de chose…), cette épreuve a été de plus en plus mise en avant, de même que son personnage titre, et a de plus en plus sombré dans les dérives. Exit le côté culturel des débuts, les plats sont devenus de plus en plus un grand mélange de n’importe quoi sans cohérence, pourvu que les candidats soient au bord du vomissement et que Rovelli puisse jouer les sadiques.
En fait, l’épreuve du Restaurant de Fort Boyard est le deuxième pire exemple d’épreuve de dégustation qui n’ait jamais été fait dans un jeu d’aventure pour moi. Le premier pire exemple étant également dans Fort Boyard (ah oui, la production n’a pas fait les choses à moitié pour me convaincre définitivement de la merdicité de ce genre d’idée…), mais j’y reviendrai.
Car vous vous souvenez de ce que je disais au début sur ce genre d’épreuve, que c’était à la fois une preuve de dépassement de soi pour les candidats et un moment divertissant pour le spectateur ? Eh bien on force beaucoup trop le trait sur ce deuxième point, à tel point que le premier n’a même plus d’importance et qu’on n’a même plus d’alibi culturel. La mise en scène accentue de façon exagérée le sadisme de ce genre d’épreuve, à un point que je ne trouve plus ça drôle du tout, mais juste gratuitement humiliant (c’est d’ailleurs grosso modo le résumé de mon impression sur le programme depuis la décennie 2010… quand je disais que cette épreuve en était symptomatique).
Franchement, c’est censé prouver quoi, qu’on est capable de se forcer à manger un plat qui soit volontairement le plus répugnant possible ? Si on demande aux enfants d’apprendre à manger de tout y compris des plats moins appétissants, c’est surtout pour des raisons nutritionnelles ! S’il trouve que les brocolis dans son assiette ne sont pas bons, c’est parce qu’ils n’auront pas été préparés de la meilleure façon, mais personne ne cherche à cuisiner aussi mal volontairement ! Et tant qu’à parler des enfants, bonjour le message renvoyé sur le fait qu’apparemment, certains peuvent jouer avec la nourriture… ah oui, ce programme » » « familial » » » est décidément de plus en plus sain pour cette cible !
Et attendez, je n’ai pas fini au sujet de FB ! Parce qu’en 2020, la production a eu l’idée lumineuse de donner un autre rôle à ce personnage si attachant qu’est Rovelli !
Bon, en fait, c’est dès 2018 avec le Willymix, mais dans une épreuve qui ne mettait pas en avant de la dégustation (enfin, si, mais au sens figuré…), ce qui ne l’empêchait pas d’avoir elle aussi une mise en scène la plus nauséabonde possible et de susciter en moi un courroux encore plus profond que je n’en ai jamais eu au sujet de ce jeu, mais je serais un peu hors sujet si je m’étendais sur cette version de l’épreuve ici. En 2020, son épreuve a évolué, avec un concept… encore plus ignoble. Quand je pense que le CSA a laissé passer ce genre de séquence sur un programme familial.
Le but est simple : faire manger au candidat un piment de force aléatoire dans une mise en scène volontairement malaisante (parce que ce jeu adore faire ça), avec un Rovelli encore plus psychopathe que jamais, et un gag pas drôle du tout à la fin où le candidat est noyé sous des trombes d’eau histoire d' »éteindre » l’incendie.
Je n’ai JAMAIS vu une épreuve aussi inconsciente dans ce jeu ; et venant d’une production qui a déjà connu des drames dans d’autres jeux (Koh-Lanta, Dropped…), je l’imaginais beaucoup plus précautionneuse que ça !!!
Oui, c’est ça, montrez que manger des piments pour le fun, c’est drôle ! Surtout, ne précisez pas que c’est à ne surtout pas reproduire chez soi, ni que ce que vous faites, c’est une adaptation d’un défi Internet stupide (le Hot pepper challenge), alors que votre public est totalement influençable… défi qui a connu ses quelques drames, soit dit en passant.
En plus de ça, certains candidats ont affirmé en interview qu’ils ont eu quelques complications pour le reste de l’aventure après ça ! Eric Antoine a même dû passer aux urgences à cause de ça ! Bon, par honnêteté intellectuelle, je précise que c’était aussi à cause d’une incompatibilité médicamenteuse avec un piment de force 10 ; mais ça montre bien à quel point la prod se foutait du côté risqué de cette épreuve et ne cherchait pas à être rigoureuse !
Parce que ces messieurs dames de la prod se sont dit qu’il n’y avait finalement aucun problème à montrer un parfait exemple de sadisme gratuit et dangereux sur une chaîne de service public dans un programme familial. HONTE SUR VOUS !!!
Cela étant, histoire que FB ne soit pas le seul à trinquer à ce sujet, on va casser des briques sur Pékin Express aussi.
Parce que bon, FB a eu son épreuve abyssalement consternante à base de piments à ingérer, certes : mais on ne l’aura vue que lors d’une seule saison. PE, en revanche, s’arrange pour faire ingérer des piments à ses candidats beaucoup plus régulièrement. Ce qui n’est malheureusement pas surprenant de la part de cette émission, celle-ci ayant la très fâcheuse tendance à persister dans ses règles de merde en mettant un point d’honneur à ne quasiment jamais vouloir les corriger.
Et même si on n’a pas de personnage au summum de son potentiel de tête à claques pour rendre ça » » « amusant » » « , ça n’en reste pas moins profondément affligeant et irresponsable de la part du programme.
Je me moque totalement de ce que les producteurs diront pour essayer de faire passer ce genre d’épreuve, que c’est supervisé par un médecin ou quoi : faire manger des piments forts pour le fun, c’est juste profondément DÉBILE et IRRESPONSABLE. Et, oui, je ne lésine pas sur les effets typographiques, parce que je le pense vraiment.
Parce que bon, ok, les règles mal branlées style drapeau rouge ou Time is money en roue libre, ça m’énerve beaucoup ; mais au moins, il n’y a pas d’incidence sur la santé des candidats, ni de message nocif transmis aux spectateurs, notamment les plus jeunes.
A nouveau : vous aurez beau prendre toutes les précautions que vous voudrez, dire qu’il ne faut pas le reproduire chez vous, etc. Merde, quoi. En quoi c’est censé prouver quelque chose ou être amusant d’imposer aux candidats de manger quelque chose qui peut leur causer des brûlures d’estomac, voire les envoyer à l’hôpital ?! Surtout que c’est déjà arrivé ! (certes, ce n’était pas dans Pékin Express mais dans Fort Boyard, mais là encore le seul intérêt de l’épreuve était d’ingérer un piment).
C’est du même niveau que les challenges “cap ou pas cap” nocifs pratiqués par les adolescents, genre Blackout challenge, Benadryl challenge, A4 waist challenge, Ice and salt challenge… ou encore le Hot pepper challenge, dont c’est justement le principe. Des défis profondément stupides en soi, encouragés par des inconscients qui veulent faire passer des comportements à risque pour quelque chose de “cool” sous prétexte d’intégration sociale ; mais qui, en pratique, sont nocifs pour la santé.
Et malgré toutes les précautions prises, ce que fait Pékin Express avec ses règles et épreuves basées sur des ingestions de piments, c’est dédramatiser ce genre de défi dangereux, en le présentant sous un jour plus « fun » ; et donc, en l’encourageant, d’une certaine manière. Je n’ai strictement aucun respect pour ce genre de comportement totalement irresponsable.
Pfiou ! Désolé pour ce pavé enflammé (ça tombe bien, on parlait de piments), mais ça m’a fait un bien fou de pouvoir m’exprimer aussi vivement à ce sujet-là. Et puis, de toute façon, comme je le disais, si je n’arrive plus à supporter les épreuves de dégustation dans les jeux d’aventure, c’est grandement à cause de ces jeux-là en particulier.
Et quand bien même les autres jeux d’aventure en pâtissent également, je n’ai pu que constater à quel point la vocation faussement divertissante de ce genre d’épreuve sous un prétexte fallacieux pouvait être agaçante.
Donc, oui, je ne trouve pas que les épreuves de dégustation de Pékin Express (hors ingestion de piments) ou Koh-Lanta (qui, à ma connaissance, s’est toujours passée de dégustation de piments, c’est déjà ça…) soient particulièrement plus finaudes. C’est sûr qu’elles n’atteignent pas les sommets de mise en scène malaisante et ignoble de Fort Boyard, mais leur existence suffit quand même à me faire profondément soupirer lors des émissions où elles vont fatalement arriver. Parce que je sais bien qu’in fine, le but de la prod derrière, ça reste de divertir le spectateur au détriment du candidat.
Mais bon, pour terminer sur une note un peu plus positive, j’aimerais tout de même parler d’une épreuve de dégustation qui m’a plu… parce que oui, c’est possible ! Et cette épreuve était dans la saison 2 de Je suis une célébrité, sortez-moi de là.
Alors non, ce n’était pas l’épreuve navrante de demi-finale façon Cuisine des mousquetaires où les candidats devaient eux-mêmes préparer le plat volontairement immonde qu’ils allaient déguster après (ça, c’était tout aussi inepte que les défis de Rovelli, et c’est un exploit d’avoir atteint ce niveau-là).
Mais une épreuve d’équipe, où, pendant que quatre équipiers devaient subir une épreuve d’endurance, deux autres devaient se relayer pour manger des plats de leur choix, chaque plat permettant de réduire la durée durant laquelle les autres faisaient de l’endurance. Cette épreuve est très astucieuse : en effet, elle ne repose pas uniquement sur un principe de faire manger des trucs dégoutants aux candidats, et ne met donc pas plus d’emphase que nécessaire sur cette partie-là ; elle laisse le choix aux candidats, donc donne un côté moins forcé ; et ne fait pas percevoir la dégustation comme un gage humiliant.
Comme quoi, ça reste possible d’avoir un principe de dégustation dans une épreuve qui tienne tout à fait la route ; et quitte à mettre de la dégustation dans les jeux d’aventure, j’aimerais davantage voir ce genre d’épreuve plus travaillée et moins rentre-dedans.