Si je vous demande de me citer un jeu diffusé sur France 2 entre 12 heures et 13 heures durant les années 2000, il y a probablement de fortes chances que vous me répondiez TLMVPSP ; ce à quoi je vous répondrai : non, caca boudin euh, pardon, « Effectivement, votre réponse n’est pas dénuée de fondement, mais ce n’était pas à ce divertissement peu voire pas délectable que je songeais ».
Peut-être penserez-vous alors à Pyramide, dont ce fut les dernières années de diffusion en début de décennie ; ce qui me fera davantage plaisir, mais qui n’est toujours pas la réponse qui m’intéresse ici, étant donné que ce jeu largement plus délectable que le précédent a déjà eu droit à sa critique.
La Cible, alors, qui était un peu coincé entre les deux jeux précédents ? Là encore, déjà fait aussi.
Le Juste Euro ? Je vous félicite pour vous être souvenus de ce bide de janvier 2002, qui n’aura même pas duré un mois ; mais en tant que déclinaison du Juste Prix, je n’avais pas l’intention de le traiter ; et de toute façon, l’émission est devenue introuvable.
Il ne reste plus grand-chose, là ; à moins que… le Millionnaire ? Après tout, à cette époque (de 2004 à 2008, pour être plus précis), il était diffusé juste après le « grand » jeu du midi, et juste avant le 13 heures ; donc, ça compte ! Sauf que je ne vois pas du tout ce que je pourrais développer au sujet d’une roue qui tourne une seule fois (si ce n’est qu’avec ce format « pastille », on perdait le côté « divertissement/talk » qu’on avait auparavant, ce qui n’a pas plu à tout le monde…).
Néanmoins, cette dernière proposition est la plus proche du jeu que j’avais en tête…
En effet, on va parler d’un jeu un peu « bouche-trou » dans l’idée, comme l’était un peu le Millionnaire qui l’aura suivi : 30 000 euros chrono.
Présenté par Thierry Baumann, qui était alors chroniqueur de l’émission Thé ou café, ce jeu a été inauguré durant l’été 2003, pour prendre fin durant le premier trimestre de l’année suivante. Et, à ce titre, j’imagine qu’entre son côté « bouche-trou » et sa faible durée de vie, il a dû passer inaperçu pour pas mal de gens, et qu’il est désormais assez oublié.
Cependant, si je voulais en parler, c’est parce qu’en dépit de la faible durée d’un épisode de 30 000 euros chrono (dans les 7 ou 8 minutes), j’ai quand même été assez surpris par le fait que pour un jeu “pastille” (on va plutôt employer ce terme-là à partir de maintenant, c’est moins réducteur que “bouche-trou”), il était relativement poussé, au point même de pouvoir me fournir de la matière à réflexion pour une critique.
De fait, ce sera sans doute le jeu le plus rapide que j’aurai certainement traité sur ce blog ; mais il le mérite quand même.
Le temps file !
30 000 euros chrono est un jeu dont les parties se jouent avec un seul candidat ; ce qui fait que, selon mon modèle de classification, en termes de mécanique, il se placera soit dans la catégorie des jeux « à la QVGDM » (càd un jeu au format le plus souvent feuilletonnant, qui peut prendre fin à tout moment, et dont le but pour le candidat sera de monter le plus haut possible dans une pyramide de gains), soit dans celle des jeux « à la Fort Boyard » (càd un jeu où une partie tient un épisode, et où l’ensemble des manches a un impact sur la façon dont la finale sera paramétrée).
Ici, on est dans la seconde catégorie, avec un jeu qui va donc se décomposer en deux parties, la première déterminant la façon dont la seconde pourra être jouée.
Néanmoins, on va quand même rester très loin de la complexité d’un Fort Boyard à ce niveau-là (ou alors, un Fort Boyard saison 1990…), étant donné que l’émission ne dure qu’une petite dizaine de minutes, je le rappelle.
On va disputer une première manche, durant laquelle le but pour le candidat sera à la fois de constituer une cagnotte potentielle et d’économiser du temps pour sa finale ; puis on va disputer directement ladite finale juste après, pour voir s’il va réussir à remporter cette cagnotte ou non.
J’ai déjà eu l’occasion de dire pourquoi j’adorais les mécaniques « à la Fort Boyard » ; mais toutefois, je déplore qu’assez peu de jeux y fassent appel. La plupart du temps, les jeux n’assument pas de le faire sur toute la durée d’une émission, ce qui fait que ce genre de concept n’est souvent appliqué que partiellement (comme 8 chances de tout gagner, où on a d’abord une première manche de confrontation plus classique, avant de passer à la partie « à la FB » proprement dite).
Donc, dans un sens, 30 000 euros chrono se focalise entièrement dessus… mais ne cherche pas à développer davantage cette formule, en raison de sa courte durée. On aurait presque pu imaginer une manche de pré-sélection pour avoir un jeu plus « complet », mais ça aurait plus fait office de rembourrage qu’autre chose.
Mais de toute façon, ce jeu assume très bien le fait d’avoir une durée très courte, ne serait-ce déjà que de par son titre. Et ça ne rend pas l’émission simpliste ni minimaliste pour autant.
On voit notamment via sa mise en scène que ce jeu met à profit sa courte durée en se basant dessus. Le plateau est un chronomètre géant, en forme de demi-cercle, avec une trotteuse sur laquelle le candidat va se placer, et faire le demi-tour du plateau durant sa partie. Celle-ci étant évidemment chronométrée, on va donc voir le candidat se déplacer tant que le chrono va tourner.
C’est un effet que j’aime bien, et qui donne un peu de personnalité au programme.
La première manche
Durant cette première manche, le candidat disposera de 80 secondes pour répondre à une douzaine de questions.
Toutefois, il devra veiller à ne pas utiliser l’intégralité de son chronomètre pour répondre à ses questions.
D’une part : car le temps qu’il économisera à la fin de la manche lui servira pour la finale, donc plus il en économisera, plus il sera confortable durant celle-ci.
D’autre part : car le temps économisé intervient dans le mode de calcul de la cagnotte que le candidat peut potentiellement remporter.
En effet, durant toute la première manche, un calcul sera affiché en bas de l’écran : le résultat est la multiplication de la cagnotte actuelle du candidat par le nombre de secondes restantes.
Le résultat sera donc constamment dégressif ; à moins que le candidat ne fasse fructifier sa cagnotte pendant la manche.
Pour ce faire, rien de plus simple : il suffit de donner des bonnes réponses. Chaque bonne réponse permet de rajouter 100 € à la cagnotte ; en revanche, chaque mauvaise réponse en retranche 50 €. Passer une question revient à donner une mauvaise réponse, on ne revient pas sur les questions passées à la fin.
Une fois que le candidat a répondu à toutes ses questions, le chronomètre est bloqué, et le montant maximum que le candidat peut gagner est alors fixé. Il devra remporter la finale pour pouvoir le valider.
En fait, je n’ai pas énormément de choses à développer sur ce principe. Si je devais le résumer, ce serait : simple mais efficace, et il fallait y penser.
J’aime bien cette façon dont le résultat final est « multi-paramétré », à la fois en fonction du nombre de bonnes réponses et du temps économisé.
Néanmoins, il y a quand même un détail qui n’aura sans doute pas échappé à votre sagacité : selon ce mode de calcul, il est donc théoriquement possible de dépasser le plafond de 30 000 € suggéré par le titre du jeu. D’autant plus que l’animateur citait souvent différents exemples de calculs pour arriver à 30 000 € (1 000 € x 30 secondes ; 1 200 € x 25 secondes…), et qu’on ne voit pas pourquoi on ne pourrait pas avoir, par exemple, 1 200 € x 30 secondes, avec un montant qui dépasserait donc ce « maximum »…
Bon, en pratique, il me semble que ça n’est jamais arrivé, étant donné que ça implique de faire une excellente performance, ce qui n’est pas monnaie courante. J’aurais été curieux de savoir ce qu’il se serait passé si ce cas de figure avait déjà eu lieu… mais à en croire ce que disaient certains articles parlant du jeu, si le candidat avait l’occasion de remporter par exemple 32 000 €, il serait resté à 32 000 € quand même.
Bref… tout ce que j’aurais à reprocher à ce niveau-là, c’est le fait d’avoir un titre un peu mensonger. Et encore, ça reste moins pire que Super Million Question où c’était vraiment impossible en pratique de gagner ce fameux million promis par le titre…
La finale
Durant le temps imparti restant, le candidat devra réfléchir à la question qui lui sera posée.
Cette question a six propositions de réponse ; et avant que le chronomètre ne s’arrête, le candidat devra donner sa réponse. Si elle est correcte, il remportera alors le montant établi par le mode de calcul décrit précédemment ; sinon, il remportera le montant de la cagnotte, sans qu’il ne soit multiplié par le nombre de secondes qu’il avait économisé.
Un principe simple… dont je ne suis pas fan, dans la mesure où on se retrouve dans un cas de figure de finale « tout ou rien ». Enfin, plutôt « tout ou pas grand-chose », puisque le candidat gagne quand même quelque chose quoi qu’il arrive, ce qui rend cette façon de terminer le programme moins frustrante qu’un Money Drop.
Mais bon, nonobstant la présence d’un gain minimal, je n’aime pas qu’un programme se contente de poser une simple question en guise de conclusion, qui va conditionner à elle seule le fait que le candidat va gagner ou non, sans aucune nuance apportée. Ici, le candidat ne peut pas choisir le thème de sa question, il n’a pas de joker qui pourrait l’aider à y répondre, il n’a pas de choix « compromis » où il peut partir avec un gain modéré en décidant de ne pas répondre à la question… le seul paramètre sur lequel il « intervient », c’est le temps alloué à la réflexion, qui dépend de sa performance durant la première manche ; mais il n’est pas particulièrement décisif non plus, dans la mesure où les questions posées ne font pas systématiquement appel à une réflexion chronophage ; et si le candidat n’a de toute façon aucune idée de la réponse, ce ne seront pas quelques secondes en rab qui l’aideront beaucoup.
Après, même si je trouve cette fin un peu trop expéditive… n’oublions pas non plus qu’on est dans un jeu qui ne dure qu’une petite dizaine de minutes au total (voire moins), et que l’émission n’affiche pas non plus d’ambitions aussi fortes ; même si pour France 2, le gain « maximal » théorique est assez anormalement élevé, surtout vu la durée du programme et son créneau de diffusion. Enfin, cela dit, en pratique, entre les performances des candidats en première manche qui ne garantissent pas forcément des gains si élevés, et cette finale « une chance sur six ».
Bref, là où je veux en venir, c’est qu’en à peine dix minutes, on n’a de toute façon pas le temps de faire monter la sauce au niveau des enjeux ; et qu’on a donc largement moins la frustration de se dire « Quoi, tout ça pour ça ?! » en regardant cette finale. Là où ça pèche davantage pour un Money Drop, dont les parties sont plus longues et dont les enjeux sont plus élevés, ce qui rend par conséquent la finale bien plus énervante…
Mais bon, on aurait tout de même pu pousser un peu plus le principe. Par exemple, en modulant aussi le nombre de réponses du QCM selon le choix du candidat, quitte à lui faire remporter moins d’argent, un peu comme la finale de Que le meilleur gagne 2012.
Total : 11,5/20
Bon, c’était une critique assez courte ; mais proportionnée à la durée du jeu.
En effet, par rapport à ses enjeux et ses prétentions, je trouve que 30 000 euros chrono fait très bien le café. Évidemment, ce jeu n’a rien de très mémorable, vu que c’est difficile de marquer les esprits en 7-8 minutes ; mais j’apprécie qu’il ait tout de même proposé un concept créatif, malgré le peu de temps qui lui a été alloué. Après tout, certains jeux 3 à 4 fois plus longs ont un concept bien plus bateau que ça…
La prochaine fois, on va voir un autre jeu à un seul candidat, dont le titre parlera encore d’argent…