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#123 – La piste de Xapatan

Le genre du jeu TV ne se limite évidemment pas au jeu de plateau ; il y a aussi les jeux d’aventure, obéissant à des codes différents, et nécessitant des lieux de tournage plus atypiques ; mais offrant un sentiment d’exotisme et de découverte qui fait tout leur charme.
Mais il a tout de même fallu un moment avant que les jeux d’aventure ne deviennent une “évidence” eux aussi. Avant les années 90, on avait La chasse aux trésors (1981-1984) comme référence en la matière ; toutefois, même si on y retrouvait l’exotisme et la découverte dont je parlais plus haut, j’ai envie de dire que c’était un peu de la triche, dans la mesure où les candidats étaient en studio, et que c’était Philippe de Dieuleveult qui faisait tout le travail d’exploration et de découverte. Je pourrais également citer En route pour l’aventure, jeu diffusé sur La Cinq en 1988, avec des candidats plus proactifs ; mais dont les ambitions restaient un peu moindres, et qui ciblait un public plus jeune.
De fait, j’ai plutôt tendance à considérer que c’est à partir de Fort Boyard que le genre s’est véritablement trouvé ; et même là, il n’est pas devenu une “évidence” tout de suite. La toute première saison fut un énorme pari totalement incertain, qui méritait d’être tenté ; mais elle n’aura fonctionné qu’en demi-teinte. C’est véritablement à partir de l’année suivante, après quelques ajustements de formule, que le programme commencera à devenir une référence ; et la suite, vous la connaissez.

Toutefois, Tilt Productions (la société de Jacques Antoine, à qui l’on doit Fort Boyard) n’a pas voulu s’arrêter là ; à présent qu’elle avait commencé à défricher le genre, elle voulait voir comment décliner le concept de différentes manières. En particulier la formule “à la Fort Boyard” ; mais la formule “à la Chasse aux trésors” ne sera pas en reste non plus, avec le lancement de la Carte aux trésors quelques années plus tard, qui rencontrera là encore un certain succès (et qui, à mes yeux, sera véritablement un jeu d’aventure par rapport à son ancêtre, en impliquant les candidats plus directement dans leur périple).
Mais du côté des jeux inspirés de Fort Boyard, ce sera plus mitigé. Du côté des succès, on peut citer Les mondes fantastiques et Mission Pirattak, davantage destinés au jeune public ; ou encore The Crystal Maze, qui ne parlera pas au public français (et pour cause, c’est une version de Fort Boyard davantage pensée pour le Royaume-Uni, avec un lieu de tournage moins contraignant), mais qui aura été un certain succès dans son pays. En revanche, les jeux plus “grand public”, imaginés durant les années 90, et destinés à la France, n’auront pas connu autant de succès, voire auront été des échecs.
Avec, pour commencer, le jeu d’aujourd’hui.

La piste de Xapatan était donc un jeu diffusé sur Antenne 2, du 21 février 1992 au 3 juillet 1992, créé par Jacques Antoine, et présenté par Sophie Davant. Sophie Davant qui était jusqu’alors la co-animatrice de Fort Boyard ; et qui, prise par ce nouveau tournage, avait dû laisser sa place à Valérie Pascale (pour un résultat malheureusement plus discutable, mais c’est une autre histoire).
L’émission a connu 20 épisodes, dont un spécial animateurs (sur lequel on reviendra) ; mais, si elle n’aura pas démérité, avec des scores allant de 4 à 4,5 millions de téléspectateurs, ce ne sera pas jugé suffisant pour qu’elle soit reconduite.

Synopsis

Le jeu est inspiré d’une ancienne légende maya :

Non loin de Ciudad Valles, une jeune fille pouvait, une fois dans sa vie, gravir la montagne sacrée pour rapporter l’une des 20 statuettes représentant le Dieu qui deviendrait son protecteur. Chacune d’elles portait au front une pierre précieuse. Mais un jour, une jeune fille avide a voulu emporter toutes les statuettes. Les Dieux furieux fermèrent alors derrière elle l’accès aux grottes en jalonnant leurs parcours d’obstacles infranchissables.
C’est donc ces obstacles que doivent franchir les sept candidats de l’émission pour rapporter la statuette sacrée : courses, sauts d’obstacles, traversées de rivière, saut dans le vide, rien n’est épargné aux candidats aventuriers pour ce jeu très physique.
Mais les plus faibles candidats sont éliminés au fur et à mesure ; et seul un candidat peut parvenir au bout de la piste, et ainsi retrouver la jeune personne et la bonne statuette.
Une fois cela accompli, rien n’est encore gagné, car il lui faut à tout prix rejoindre la gare de Xapatan avant que le train ne parte pour remettre la statuette, et ainsi recevoir son gain.

Un point que j’apprécie beaucoup avec les jeux d’aventure de cette époque, c’est qu’ils se voulaient immersifs ; et pas seulement en se déroulant sur des lieux plus exotiques, mais aussi en soignant leur storytelling (ou la communication narrative, pour rester français).

Déjà, narrativement, le pré-générique prend soin de présenter le contexte, avec la légende que je viens d’évoquer plus haut.
Une idée que LPDX aura eue, pour une fois, bien avant Fort Boyard, qui ne le fera qu’à partir de 2011. Alors que Fort Boyard disposait aussi de sa propre légende dès le départ, et faisait un bon travail de storytelling là encore ; mais il n’a pas spécialement cherché à l’expliquer texto à l’époque.
Après, dans le cas de Fort Boyard, ce n’était pas un défaut pour autant. En fait, on pourrait même dire que le fait de ne pas expliquer textuellement la trame narrative, et de laisser le spectateur la comprendre par lui-même, est plus subtil.

Mais LPDX parvient très bien à retranscrire son aspect narratif dans sa mécanique de jeu.
En effet, en début d’émission, on voit bien la fille arriver sur la montagne, sans être inquiétée ; et on la voit bien tenter de récupérer toutes les statuettes présentes.
Mais après, en revanche, on voit bien que l’accès à la montagne est devenu beaucoup plus ardu, avec des obstacles présents tout le long de la route. On a également le risque d’élimination qui est présent tout du long ; ainsi que le fait qu’un seul candidat ne puisse y parvenir (mais ça, c’est amené de façon beaucoup plus discutable, on y reviendra).
Parallèlement, on a une mise en scène en début de jeu, où on voit un archéologue demander aux candidats de lui ramener ce qu’il souhaite, et leur dire de faire attention à ne pas mettre trop longtemps ; car il doit prendre le train, qui part dans 75 minutes, ce qui justifie pourquoi il y a un chronomètre général.

En outre, on prend également soin de nous montrer le parcours que les candidats doivent suivre, pour encore plus d’immersion ; avec un rappel régulier de cette carte entre deux obstacles, pour nous tenir au courant de l’avancée des candidats.

Bref, ça valait effectivement la peine d’aller jusqu’au Mexique pour justifier toute cette immersion narrative ; et en plus de ça, ça ajoute la touche d’exotisme et de dépaysement indispensable aux jeux d’aventure.

Mais parlons à présent de la mécanique.

Un parcours semé d’embûches

Une fois le chronomètre de 75 minutes lancé, une équipe de 7 candidats (et précisons que je ne risque pas d’employer l’écriture inclusive ici, car ce sont bel et bien tous des hommes… on en reparle) est conduite par Sophie Davant, dans un véhicule qui va suivre la route (la fameuse piste de Xapatan).
Leur but est de rejoindre le camp où se trouve la candidate chargée de récupérer les statuettes.

Bon, déjà, on peut noter un aspect un peu discutable : le côté relativement sexiste de la mécanique de jeu. Oui, car il faut que les sept candidats soient des hommes ; et que celle qui récupère les statuettes soit une femme. Pour les hommes, c’est “justifié” (selon les critères de l’époque) par le fait que plusieurs obstacles nécessitent de la force, et doivent être passés collectivement ; pour la femme, en revanche, rien ne le justifie spécialement, mais ça permet au moins de ne laisser aucun genre sur le carreau…
Après, je ne cherche évidemment pas à déclencher de polémique ; mais c’est juste que, si ce jeu était sorti 30 ans plus tard, il aurait sans doute essayé de rééquilibrer un peu mieux la répartition des genres, ou à calibrer ses obstacles de sorte que davantage de profils puissent les passer.
Bref, fermons la parenthèse, et revenons à la mécanique.

Comme on est dans une formule à la Fort Boyard, on va donc avoir un enchaînement d’épreuves, qui va aboutir à une phase finale qui en sera la validation.
Ici, ce qui va faire office d’épreuves, ce seront les obstacles à franchir sur la fameuse piste, afin que la voiture puisse progresser.

Ce qui est censé pimenter ces obstacles, ce sont deux choses :

  • D’une part, le risque d’élimination ;
  • D’autre part, le temps.

Commençons par le risque d’élimination.
Tous les candidats disposent d’un harnais dans leur dos ; et leur but, c’est de le garder à tout prix.
Mais le problème, c’est que les obstacles sont souvent gardés par des personnages malveillants, dont le but est de le leur chiper. Et si un candidat se fait voler son harnais, il est éliminé, et l’équipe continuera sa route sans lui.
Ce qui est plutôt une bonne idée… même si, en pratique, elle n’arrive pas à être aussi prenante qu’elle ne le devrait, pour plusieurs raisons.

Pour commencer : les moments où les candidats se font prendre leur harnais ne sont pas toujours très bien filmés, ce qui fait que, parfois, on ne le remarque même pas, et qu’il faut qu’on entende l’animatrice commenter l’action pour le comprendre.
Ensuite : on manque d’attachement envers les candidats. Certes, on nous les présente rapidement en tout début de jeu… mais c’est rapide. Et les épreuves ne permettent pas particulièrement de les développer individuellement ; donc, c’est triste à dire, mais quand on voit un candidat se faire éliminer, la réaction qu’on a, c’est juste : “Ah.”.
D’autant plus qu’on en reparlera plus loin : mais, contrairement à Fort Boyard où on comprend que l’équipe a besoin de rester la plus nombreuse possible jusqu’à la fin ; ici, c’est valable surtout durant la première heure de jeu (où c’est mieux d’être plus nombreux pour passer les obstacles plus facilement, ou de façon moins risquée)… mais, par la suite, ça n’a plus autant d’importance.
Et enfin, toutes les épreuves ne sont pas forcément concernées par ce risque d’élimination. En fait, je dirais même que seule la moitié d’entre elles (à la louche) présentent ce risque d’élimination, sur un parcours normal.

Bon, c’était difficile d’avoir une image nette ; mais sur cette épreuve où les candidats doivent franchir un pont, les indigènes peuvent tenter de leur piquer leur harnais.

Quant au risque temporel… bon, autant le dire tout de suite : à ce niveau-là, je parle surtout du chronomètre général.
Individuellement, les épreuves ne disposent pas de chronomètres spécifiques, façon clepsydre de Fort Boyard ; et si les candidats doivent les réussir le plus rapidement possible, c’est juste pour économiser du temps sur le chronomètre global.
Ce qui n’est pas inintéressant en matière de jeu dans son ensemble ; mais qui n’est pas aussi prenant au premier abord qu’une bonne vieille épreuve à clepsydre, dans la mesure où le suspense est plus immédiat dans ce dernier cas de figure.

Cependant, il est possible que les candidats n’arrivent pas à franchir un obstacle (parce qu’ils n’ont pas la bonne technique, ou ne disposent pas d’assez de force).
Auquel cas, il y a un moyen possible pour le contourner ; mais il est plus risqué. Comprendre par là que l’un des candidats risque d’être éliminé ; et c’est pour ça que l’animatrice appelle cette option de substitution un « sacrifice ».
En effet, une fois devant l’obstacle de substitution, un tirage au sort est effectué, pour savoir qui va devoir s’y coller. L’épreuve est censée être réalisable ; en revanche, un antagoniste est présent, et il va évidemment tenter de prendre le harnais du candidat sacrifié. S’il y parvient, ça fait donc une élimination.

On remarque que le chemin a bifurqué. Cela signifie que les candidats ont préféré contourner l’obstacle initial.

L’idée est bonne. Certains obstacles assument en effet de n’être là que pour faire perdre du temps aux candidats ; donc, dans un sens, ça leur laisse le choix, entre l’option sécurisée mais chronophage (et pas forcément assurée d’être réalisable selon les profils des candidats présents à ce moment-là), ou l’option risquée, réalisable mais avec la possibilité que n’importe quel candidat puisse être éliminé.

Le seul truc un peu ennuyeux avec ça, c’est que l’épreuve initialement prévue n’est généralement pas très passionnante à suivre. Ce sont souvent des épreuves de force, qui prennent un certain temps à être faites ; et, même si ce n’est pas injustifié dans le contexte (vu qu’il faut le plus possible préserver le chronomètre général), ça reste assez ennuyeux à regarder. Surtout quand c’est diffusé dans son intégralité…

Cet obstacle-là en particulier, où il faut pousser une roue contenant trois colosses, pour l’écarter du chemin, est aussi éprouvant à passer pour les candidats, qu’à regarder pour le spectateur… c’est que ça peut quand même durer 5 minutes entières, où on voit juste les candidats pousser.

Bref, tout ça fait que la première heure de jeu, composée quasi-exclusivement de ces passages d’obstacles, est finalement un peu monotone, en dépit de ce qui est censé la pimenter.
Mais, heureusement, il n’y a pas que ça qui va composer cette première partie de jeu.

Trouver la bonne statuette

En parallèle, l’objectif pour les candidats est de déterminer quelle est la statuette qu’ils devront rapporter à l’archéologue. Ce qui va se manifester par deux aspects.

D’une part : la candidate est chargée de récupérer le plus de statuettes possible, de son côté, pendant que les candidats suivent le parcours.
Sa progression est montrée entre deux obstacles… et, malheureusement, ça peine un peu à être prenant là encore.
Cela dit, je pense que c’est plutôt un problème de montage qu’autre chose. En effet, le jeu montre ses phases de recherche davantage comme un intermède qu’autre chose, histoire de dire qu’elle existe, et de justifier le nombre de statuettes parmi lesquelles les candidats auront le choix à la fin.
Alors, soit ça n’a pas été jugé assez passionnant pour le montrer, auquel cas on aurait finalement pu essayer d’adapter la mécanique, de sorte qu’on se passe tout simplement de la candidate, et qu’on fasse en sorte que ce soient les candidats eux-mêmes qui trouvent les statuettes ; soit il aurait fallu davantage la montrer dans l’exercice.
Et, honnêtement, ça aurait pu être un peu plus intéressant de s’attarder là-dessus, d’autant plus que je suis intrigué par cette phase de recherche, pour voir ce qu’elle doit faire et ce qu’elle doit explorer pour trouver les statuettes.

Bon, notons toutefois qu’elle sert évidemment à quelque chose ; dans la mesure où, si elle ne trouve pas la bonne statuette, les candidats ne pourront pas espérer gagner le maximum.
Mais c’est juste que le montage ne valorise pas assez cet aspect-là.

Sinon, je parle de “trouver la bonne statuette” ; mais comment sait-on laquelle est la bonne ?
Ce n’est pas du côté de la candidate qu’il faut se pencher pour le savoir ; mais des candidats.
En effet, pendant leur parcours, j’ai omis de parler de différentes phases qui viennent le jalonner, et qui impliquent cette histoire de statuette.
A trois reprises (dont une à la fin de la piste), les candidats s’arrêtent devant une stèle, sur laquelle il y a des correspondances entre des symboles précolombiens et leurs “traductions” en français.
Avant qu’ils ne se lancent dans l’aventure, l’archéologue leur a remis un parchemin, avec 6 symboles. Le but des stèles est de leur indiquer à quoi correspondent les symboles ; et, une fois qu’ils ont la signification de tous les symboles, ils doivent en déduire ce qu’ils sont censés chercher. Sachant que ce sera une figure humaine, un animal, ou un objet ; représenté sur l’une des statuettes que la candidate devra retrouver.

Par exemple, ici, on cherche un animal qui se déplace dans les airs, et qui agit de nuit pour capturer d’autres animaux…
… et la réponse est : la chouette. Si la statuette en question a été récupérée, les gagnants auront alors sans doute la chance de remporter le gros lot.

On retrouve là la fameuse tendance de Jacques Antoine à jouer à la fois sur les jambes et sur la tête ; et, personnellement, l’aspect “réflexion” est quelque chose que j’ai toujours apprécié dans ses jeux d’aventure.
En effet, outre le fait que ça permet de solliciter diverses qualités, c’est également plus interactif pour le spectateur, qui peut réfléchir de son côté, avant que les candidats n’aient la réponse. Comme c’est le cas pour les énigmes du Père Fouras, ou le mot-code qui déclenche la chute des Boyards en Salle du Trésor ou les questions de zoologie du Plateau 215 (non, ça, c’est de la fange, et je suis sûr que si Jacques Antoine l’avait vu de son vivant, il ne l’aurait pas du tout apprécié).

Mais le petit problème, ici, c’est qu’à l’instar de ce que fait la candidate, le montage peine à valoriser ces phases de réflexion, et surtout à les rendre interactives.
Certes, de notre côté, on nous affiche la signification des indices ; mais ça aurait été bien de nous afficher, en même temps, les différentes statuettes, pour qu’on puisse jouer à trouver quelle est la bonne de notre côté, plutôt que de juste voir les candidats faire leur choix en temps voulu.

D’ailleurs, on y arrive bientôt…

Un aspect semi-compétitif… bizarre

Une fois arrivés à la fin de la piste, et après avoir vu la dernière stèle, les candidats doivent désormais… jouer chacun pour soi.
Dès que l’animatrice prononce les mots “bonne chance”, les candidats restants doivent foncer jusqu’au camp où se trouve la candidate. Celui qui y arrive en premier peut disputer la suite du jeu ; et les autres sont éliminés.

Notons au passage que, pour cette partie-là, les candidats ont été équipés de caméras embarquées.

… mouais, je ne suis pas très convaincu par cette partie-là ; même si c’est à partir de là que le jeu gagne vraiment en dynamisme.
Oui, j’en parle rapidement : autant la première heure de jeu manquait malheureusement un peu de pep’s, autant la dernière phase est plus palpitante à suivre, plus fluide, plus variée, et plus rythmée. Au moins, le jeu se rattrape bien à ce niveau-là.

Mais revenons au fait de ne garder qu’un seul candidat masculin.
Déjà, plus haut, je disais que le jeu était desservi par le fait qu’il ne mettait pas assez d’emphase sur le fait de maintenir dans la course le plus de candidats possible. Certes, ça aide l’équipe à passer plus facilement (en théorie) les obstacles basés sur la force, d’ailleurs plus nombreux vers la fin de la piste ; mais ce qui aurait encore plus aidé à souligner l’importance de rester unis, ça aurait été de le faire jusqu’au bout.
Parce que là, le fait de la jouer subitement en solo, ça me fait me dire que ce n’est finalement pas si grave s’ils ne sont plus qu’un ou deux à ce stade de la partie.

Et, surtout, la question que je me suis posée à ce moment-là, c’est : pourquoi ? Qu’est-ce qui justifie spécialement qu’il ne peut rester qu’un seul candidat pour accompagner la candidate à la fin, après tout leur parcours collectif ? LPDX a voulu se la jouer Divided avec un côté “chacun pour soi” sorti de nulle part ? (heureusement, ça reste moins grossier, mais quand même…)
Autant le jeu a jusqu’à présent fait beaucoup d’efforts pour corréler sa trame narrative avec ses règles ; autant là, la mise en scène de la porte qui se ferme est très artificielle.

Et en plus de ça, elle ne préserve même pas de la possibilité d’avoir des ex aequo, au cas où deux candidats arriveraient à la franchir en même temps.
Et dans ce cas de figure… ben, c’est la candidate qui décide lequel des deux va l’accompagner. Alors, ok, j’ai l’impression que c’est un cas de figure auquel la production n’avait pas vraiment pensé (ou alors, elle croisait les doigts pour qu’il ne se produise pas), et qu’elle a dû être prise un peu au dépourvu… mais là, c’est juste complètement con.
Vu que la candidate est restée dans son coin pendant toute la durée du jeu, sans interagir avec les autres, sans pouvoir suivre leur progression, et alors qu’elle ne les connaît même pas… comment voulez-vous qu’elle fasse proprement son choix ?

En fait, je pense que le jeu aurait finalement davantage gagné à rester collectif jusqu’au bout, quitte à imaginer une fin de jeu différente, qui soit davantage compatible avec le fait d’être à plusieurs, et qui valoriserait le fait d’avoir su garder le plus de candidats possible. Par exemple, la possibilité de transporter une statuette par candidat, pour maximiser les chances de victoire à la fin.

Mais parlons à présent de son déroulement.

La fin du jeu

Le binôme de candidats nouvellement formé doit, dans un premier temps, déterminer quelle statuette ils vont embarquer, en se basant sur la résolution de l’énigme du parchemin (en espérant que la bonne se trouve parmi celles que la candidate a réussi à trouver).
Une fois que c’est fait, ils doivent revenir à la gare. Heureusement, pas en redescendant toute la piste, mais en empruntant un raccourci. Raccourci qui n’est pas carrossable, ce qui justifie pourquoi les candidats ne sont pas arrivés par là.

Dans un premier temps, ils doivent emprunter une tyrolienne ; ensuite, il faut descendre une échelle spéléo, nager un peu, et monter un (long) escalier qui mène jusqu’à la gare.
Mais attention : tout ça se fait pendant ce qu’il reste du chronomètre général.
Si les candidats arrivent trop tard à la gare, le train repart, et l’archéologue avec, donc les candidats ne gagnent rien.

Je reconnais que c’est peut-être ce qui justifie le mieux le fait d’avoir dû ne garder qu’un seul garçon, dans la mesure où la tyrolienne est étroite, et ne peut accueillir que deux personnes.

Si les candidats arrivent à temps, en revanche, ils sont assurés de gagner quelque chose ; mais reste à savoir quoi.
Si la statuette n’est pas la bonne, ils ne remportent que 20 000 F ; si c’est la bonne, mais qu’elle est endommagée, ils remportent 70 000 F ; si c’est la bonne et qu’elle est en bon état, ils remportent le gain maximal de 100 000 F.

Pas grand-chose à rajouter. Même s’il ne l’est pas autant qu’une fontaine à Boyards, c’est appréciable que le gain final soit modulaire.

Un montage et une mise en avant un peu datés

Parlons à présent d’aspects un peu plus superficiels… après une petite digression.

Quand je parle de Fort Boyard, j’ai très souvent tendance (euphémisme) à insinuer que “c’était mieux avant” (avant les années 2010, pour être précis). Ce qui est à mon sens le cas ; mais j’aimerais nuancer.
Car Fort Boyard n’est pas devenu un programme génial dès sa première saison ; et qu’il lui a fallu quelques années de rodage pour être véritablement au point. D’une part, car il a fallu affiner la mécanique du jeu (ce qui aura été majoritairement fait dès la deuxième saison, avec des ajustements progressifs au fil des ans) ; et d’autre part, car il a également fallu affiner le montage.
En effet, je ne vous cache pas que, si j’arrive encore à regarder des émissions de la seconde moitié des années 90 sans problème à l’heure actuelle ; en ce qui concerne la première moitié, en particulier les trois premières saisons, j’ai plus de mal, et je m’ennuie un peu plus. Et si l’absence de certains codes mécaniques y est pour quelque chose, la façon de montrer l’aventure joue également.
En fait, jusqu’en 1992, la production avait vraiment voulu privilégier le naturel, sans trop procéder à des retouches ; et même si l’approche était louable, ça ne rendait pas le visionnage très palpitant. Tandis qu’à partir de 1993, la production s’est dit que ce n’était finalement pas nécessaire de montrer quelque chose de totalement fidèle à la réalité, du moment qu’on gardait l’illusion de la spontanéité. Ce qui a permis de rendre le montage un peu plus dynamique, ce qui sera affiné au fil des années (même si les années 2010 en ont complètement abusé au point de devenir contre-productif… mais bon, autre histoire).

Bref, si j’en parle, c’est parce qu’en tant que jeu sorti avant 1993, LPDX n’a donc pas pu bénéficier de cette épiphanie de la part de la production ; et par conséquent, le jeu était monté un peu comme un Fort Boyard de l’époque, en prenant un petit coup de vieux au passage. Je me dis que si on avait attendu quelques années, ça aurait peut-être été un petit peu plus dynamique à ce niveau-là…

Du côté de la bande son, là encore, on sent l’inspiration de Fort Boyard ; et, malheureusement, là encore, on retrouve un peu les mêmes défauts que dans le Fort Boyard de l’époque. Enfin, “défauts”, pas vraiment : plutôt un certain manque d’aboutissement.
Mais attention : quand je dis ça, je ne remets aucunement en question le travail de Paul Koulak. Il nous a là encore offert une bande son immersive, et adaptée à l’ambiance du jeu, avec des sonorités plus spécifiques, comme des sons de flûte évoquant davantage l’Amérique latine.
Et, sincèrement, cette bande son avait tout pour devenir un classique, comme celle de Fort Boyard ou de La carte aux trésors.

En fait, ce que je déplore, c’est plutôt le fait qu’elle soit sous-exploitée ; tout comme c’était d’ailleurs le cas avec Fort Boyard à l’époque. Ça rejoint ce que je disais plus haut, sur le fait que le montage se cherchait encore.
En effet, début des années 90, Fort Boyard ne cherchait pas systématiquement à mettre de musique de fond ; ainsi, durant la partie, les moments les plus notables où l’on entendait de la musique étaient les courses d’un point à un autre. Les épreuves, en revanche, étaient quasi-totalement dépourvues de musique, et même d’effets sonores pour les introduire ou les conclure. Ces effets sonores ne seront apparus que dans la seconde moitié des années 90, et il faudra attendre 2003 afin que toutes les épreuves aient droit à une musique de fond.
Au passage, si j’apprécie toujours autant les émissions de la seconde moitié des années 90, je reconnais que l’absence de musique pendant les épreuves est l’un des rares points que je regrette de cette période-là.

Bref, à nouveau, LPDX ayant suivi le même modèle de l’époque, est également dépourvue de musique durant ses épreuves ; et, durant la partie, la seule musique qu’on entend (jusqu’au Chacun pour soi final) est l’équivalent de la “Course d’un point à un autre” (intitulée ici “Déplacements”), qui fait ici plutôt office de musique d’accompagnement des magnétos où on voit la candidate chercher les statues.
Et à l’instar de Fort Boyard à la même période, ce montage musical a malheureusement pris un coup de vieux. Le silence pendant les épreuves n’aide pas trop à rendre leur visionnage plus agrippant ; et la répétition de la musique de “déplacements” devient un peu lassante à la longue, d’autant plus qu’elle est plus entêtante que celle de Fort Boyard. Après le visionnage d’un seul numéro, je me souvenais encore de celle-ci plusieurs années plus tard…

C’est d’autant plus dommage que la bande originale du jeu est largement plus riche, avec au moins une dizaine de morceaux à son actif.

Un mot sur la spéciale animateurs…

Oui, à nouveau, c’est encore quelque chose qui aura certainement été inspiré par Fort Boyard ; car, même si les candidats de l’époque étaient anonymes, l’émission aura quand même connu une spéciale animateurs (pour le Nouvel an 1992). Spéciale qui aura été un véritable événement, à l’époque, puisqu’elle aura réalisé la meilleure audience de toute l’histoire du jeu (11 millions de téléspectateurs et plus de 40% de part de marché !).
Donc bon… pourquoi se priver de faire la même chose pour LPDX ? Après, elle n’aura pas aussi bien marché, évidemment, le programme de base n’ayant de toute façon pas autant cartonné.

Bref. Si je traite cet épisode-là à part, ce n’est pas parce qu’il a eu droit à des règles différentes (quoique… on en reparle) ; mais parce que je n’ai pas eu le même ressenti en le regardant. Avec à la fois du positif, mais aussi du négatif.

Commençons par le positif : là où l’émission de base était plus majoritairement ennuyeuse, je reconnais que cette spéciale ne l’était pas, et que je me suis beaucoup moins ennuyé en la regardant. C’est le pouvoir magique des people, il faut croire… oui, je reconnais que ce n’est pas non plus pour rien que Fort Boyard a fini par systématiquement faire appel à ce genre de candidats (même si, à mon sens, la formule a fini par devenir suffisamment solide pour pouvoir s’en passer, mais bon).

Mais, d’un point de vue plus négatif, le côté plus divertissant de cette spéciale s’est malheureusement fait au détriment des performances globales. Mouais, sans vouloir paraître insultant pour les candidats, j’ai trouvé qu’ils n’étaient quand même pas très bons…
Le problème ne vient pas forcément du fait que ce sont des people, certes ; mais, à mon sens, LPDX me semblait dans l’ensemble un peu plus exigeante physiquement que FB (qui a des épreuves plus variées). Donc, à mon avis, il aurait fallu un casting plus adapté.

Et en fin de compte, ce niveau moins bon s’est traduit, à la fin du jeu, par… un foutage de gueule, j’ai envie de dire. Mais bon, pour rester plus poli, on va plutôt dire une “adaptation de formule”.
Bon, par principe, si vous n’avez pas vu l’émission en question et que vous souhaitez y jeter un œil, je vous préviens que je vais divulgâcher le résultat de celle-ci… mais honnêtement, vu qu’elle se regarde principalement pour son « divertissement » plutôt que pour son suspense…

Bref. D’une part, comme je le disais, les candidats masculins n’étaient pas très bons ; mais la candidate féminine, chargée de retrouver les statues, n’était pas la plus efficace non plus, et n’en a pas trouvé beaucoup. Donc, statistiquement, ça faisait moins de chances d’avoir la bonne.
Mais lors de la course finale, les candidats sont arrivés en retard, et le train était déjà parti. Ce qui aurait donc dû signifier une défaite… mais, surprise, l’archéologue est revenu en gare au moment de leur arrivée. Pourquoi ? “Comme c’était pour [l’association], la compagnie des chemins de fer nous a concocté un petit arrangement…”. Et, bien évidemment, la statuette était la bonne (et n’était pas endommagée), donc les candidats ont gagné le montant maximal.
Que dire… là, franchement, le jeu assumait presque qu’il ne pouvait pas se permettre de faire perdre les candidats, sous prétexte qu’ils jouaient pour une association. Ce qui n’était, d’ailleurs, pas vraiment compatible avec le principe de base du jeu, qui se voulait semi-compétitif, même si c’était assez mal dosé. À ce stade, ça n’avait donc plus vraiment d’importance de passer en mode “chacun pour soi” avant de retrouver la candidate…
Et puis… sérieusement, le coup de l’archéologue qui reste présent quoi qu’il arrive, même si les candidats sont en retard, ça donne du grain à moudre au problème que j’ai avec la façon dont on met en avant les associations dans les jeux TV. Ici, en l’occurrence, on rend le jeu plus “gentil”, quitte à s’asseoir complètement sur l’une des règles ; ce qui rend au final l’aspect “jeu” beaucoup plus secondaire.

Bref, autant Fort Boyard était beaucoup plus adapté à une configuration “people jouant pour une association” ; autant pour La piste de Xapatan, ce n’était finalement pas une bonne idée.


Total : 11,5/20

La piste de Xapatan est un jeu qui me laisse assez mitigé à l’heure actuelle.
D’une part, je salue vraiment toute la recherche artistique qu’il y a eu derrière ce format, notamment en matière de storytelling et d’immersion, afin de justifier les règles du jeu et de lui donner une ambiance particulière. On sent que c’est un format qui a été vraiment réfléchi en amont ; et qui, même s’il suivait une formule semblable à Fort Boyard, cherchait à proposer sa propre approche.
Mais d’autre part, dans l’exécution, on sent que le format n’était non seulement pas encore au point, mais qu’il a également pris un certain coup de vieux. L’enjeu des épreuves n’arrive pas à être aussi prenant qu’il ne le devrait, l’aspect semi-compétitif n’est pas très bien géré, et le montage de l’époque peine à mettre de l’emphase sur d’autres éléments qui le mériteraient, en plus de manquer un peu d’efficacité pour qu’on soit complètement pris dedans aujourd’hui.
En outre, là où Fort Boyard arrive à maintenir l’attention tout au long d’une même saison (même si ça dépend de la saison et du nombre d’épisodes), j’ai le sentiment qu’avec cette formule de LPDX, on en aurait fait le tour un peu plus vite. Même si j’ai apprécié ma découverte du programme à travers deux ou trois épisodes, ça ne m’a pas spécialement donné envie de dévorer les autres, s’ils venaient à être à nouveau disponibles.

Après, je suis sûr que, si j’avais pu suivre cette émission à l’époque, je l’aurais sans doute tout autant adorée que Fort Boyard à la même période, car j’aurais été tout autant pris par l’effet de fraîcheur, l’ambiance, le dépaysement ; et, tout simplement, ce côté “aventure” fascinant pour l’époque. À ce niveau-là, le jeu s’était déjà trouvé dès le départ.
Par conséquent, je trouve dommage que, contrairement à Fort Boyard, il n’ait pas eu droit à une seconde chance, pour tenter de proposer une nouvelle formule qui en aurait le plus possible corrigé les défauts. Voire, pourquoi pas, un retour surprise plusieurs années plus tard, à une époque où son modèle serait devenu pleinement rôdé, ce qui aurait alors permis à LPDX de bénéficier de l’expérience acquise entre-temps.

Mais qu’on se rassure, d’autres jeux de Tilt Productions ont pu en bénéficier. On en parlera à partir de la prochaine fois…

garsiminium

Enchanté, moi c'est garsim. Bienvenue sur mon blog, où je parle de différents sujets, légers comme moins légers.

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