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#049 – Mot de passe

Alors, je brûle d’envie de parler de Pyramide ; toutefois, avant de m’y mettre, j’estimais qu’il valait mieux que je parle d’abord de Mot de passe, qui en est un peu le prototype, d’une certaine manière. Même si, assez paradoxalement, Mot de passe est sorti après Pyramide ; du moins, par chez nous.
En effet, si le public français a connu Pyramide dans les années 90 avant de connaître Mot de passe dans les années 2000 (en 2009, pour être plus précis), c’est bel et bien Mot de passe qui a été imaginé en premier à l’international, sous le nom Password. Et largement avant que le format ne débarque par chez nous : en effet, aux États-Unis, la première diffusion de Password remonte à 1961 ! Mais ça, bien évidemment, le grand public l’ignore, puisque les spectateurs se contentent la plupart du temps de simplement savourer ce que la télévision leur offre, et ne vont pas chercher à systématiquement se documenter dès qu’un nouveau format est diffusé sur nos ondes.
De fait, j’imagine que pour certains, notre Mot de passe est peut-être apparu comme une copie de Pyramide ; alors qu’en réalité, c’est plutôt l’inverse, puisque c’est notre Pyramide qui s’est inspiré du Password originel (ainsi que d’un autre jeu américain, nommé… Pyramid, et qui était lui aussi moins élaboré que notre Pyramide). Mais la « copie » ayant davantage poussé le concept, c’est par conséquent Mot de passe qu’on aurait pu taxer de copie simplifiée ; et qu’à ce titre, il a moins d’originalité et d’intérêt. Ce qui est franchement dommage, car les formats en soi n’ont rien à se reprocher. Ce n’est pas de leur faute si les diffuseurs ne s’y intéressent pas toujours en temps voulu.
D’ailleurs, pour citer un autre exemple, je pourrais citer Amazing Race, jeu d’aventure proposé par D8 en 2012, mais débarqué sur le PAF bien après Pékin Express… alors qu’à l’international, il existait bien avant. Mais comme Pékin Express est arrivé en premier par chez nous, il est considéré comme le format « originel » par pas mal de monde, et Amazing Race comme une copie sans âme. Ce que je trouve d’ailleurs très injuste, car le jeu restait tout de même pas trop mal, et que Pékin Express est très (mais alors très) loin de rester aussi constant dans sa qualité. Mais c’est une autre histoire.

Bref. Revenons-en à Mot de passe.
Même si on aurait pu l' »accuser » d’être Pyramide en version simplifiée, en réalité, ça ne lui a pas vraiment porté préjudice.
Car il s’en est tout de même plutôt bien sorti au niveau de sa longévité, avec : dans un premier temps, une diffusion hebdomadaire de 2009 à 2016 ; complétée par une déclinaison quotidienne en 2013, ce qui aura causé au passage quelques micmacs au niveau de la gestion des règles, avec la quotidienne qui suit ses propres règles (alors que la version hebdomadaire continue à être diffusée en parallèle) ; puis, enfin, un retour temporaire surprise en quotidienne en 2020-2021, sur une autre case.
On va traiter tout ça ; mais, dans un premier temps, je vais me focaliser sur la version présentée par Patrick Sabatier, donc celle diffusée de 2009 à 2016. La version Boccolini (2020-2021) ayant quelques différences un peu notables (et pas que dans le bon sens…) aura droit à un paragraphe dédié en fin de critique.

Un mot pour un autre

Avant de nous pencher sur le déroulement d’une partie, penchons-nous sur le principe de base de ce jeu : faire deviner un mot à son partenaire, en n’énonçant qu’à chaque fois un seul mot en attente de sa réponse. C’est donc un ping-pong verbal qui va se jouer entre deux candidats ; ou, pour être plus précis, un candidat et un guest. Oui, ce jeu fait appel à des célébrités en tant que guests, pour deviner et faire deviner les mots… on en reparlera.

Les mots qu’on utilise en tant qu’indices peuvent jouer sur plusieurs aspects : ça peut être des synonymes, des contraires, des moyens de les définir (mais mot par mot), des indications sur leur nature grammaticale, etc. mais aussi leur homophonie.
Pour prendre quelques exemples simples :

  • Pour faire deviner le mot « Sale », je peux par exemple dire « Propre ». Je joue alors sur les contraires.
  • Pour faire deviner le mot « Biscuit », je peux par exemple dire « Gâteau », pour donner un synonyme.
  • Pour faire deviner le mot « Paëlla », je peux par exemple dire « Plat », attendre qu’il me réponde quelque chose, puis « Espagnol ». Ainsi, je joue sur la définition du mot.
  • Pour faire deviner « Mûre », je peux faire deviner le mot « Mur » à la place, qui est un homophone, et donner comme indice « Paroi ».

C’est une mécanique de jeu assez riche, qui joue bien sur le processus de réflexion, ainsi que sur la langue française.


Comment vous auriez fait deviner ce mot-là, par exemple ? J’aurais dit « Cassé » et « Os ».

Néanmoins, celui qui fait deviner les mots n’a pas le droit de dire tout ce qu’il veut. En effet, si on cite la liste exhaustive des « interdits », on a tout ça :

  • Dire le mot de passe en question
  • Mots qui n’existent pas dans la langue française
  • Mots composés – traits d’union.
  • Mot avec apostrophe (y compris aujourd’hui)
  • Verbes pronominaux (« s’arrêter » pour « stop »)
  • Traduction dans une langue étrangère, ou assimilée (verlan…)
  • Mots de la même famille (« hélice » pour « hélicoptère » ou « corriger » pour « rectifier » car ces mots ont le même radical).
  • Mot indice qui commence comme les mots à faire deviner (première syllabe des mots) : « montagne » pour « montgolfière » ou « épaule » pour « aisselle »
  • Mimer, montrer, toucher, désigner…
  • Marques déposées
  • Acronymes, sigles, ou abréviations
  • Épeler ou jouer sur la prononciation d’un mot de passe (« air », « ah », « thé » pour « rat »)
  • Entendre l’intégralité du mot à faire deviner dans le mot indice (dire « ticket » ou « vertical » pour « tic »)
  • Découpage du mot (par exemple, si le mot à faire deviner est « tropique », il est interdit de faire deviner « trop » puis « pique »).

… vu comme ça, ça fait un paquet d’interdictions (qui n’étaient d’ailleurs pas toutes listées dans l’émission, seules les principales étaient mentionnées), qui seront toutes sanctionnés par un « bip » retentissant, et un passage d’office au mot suivant sans marquer de point.
Cela dit, ces interdictions correspondent, pour la plupart, à une logique globale : celle de faire jouer les candidats davantage sur les liens sémantiques et grammaticaux entre les mots. Ce qui n’empêche cependant pas de faire preuve d’astuce de temps en temps, par exemple quand on a un homophone à faire deviner, et qui est plus simple à faire deviner que le mot prévu à la base.


… oui, au début, ils se contentaient de filmer l’écran, au lieu de rajouter cette liste en post-prod, allez savoir pourquoi.

Bref, des interdits cohérents pour la plupart… à un détail près : l’interdiction des mots qui commencent pareil.
Celui-ci est assez gênant, dans la mesure où, vu comme ça, c’est le genre d’interdiction qui pourrait sortir de nulle part, et qui serait juste là pour enquiquiner gratuitement les candidats.
Alors, certes, j’ai fini par comprendre que c’était pour éviter aux candidats de jouer d’une façon « détournée », en dévoilant directement une partie du mot à faire deviner (à ce niveau-là, Pyramide permettra de jouer là-dessus… mais d’une façon plus élaborée). Sauf que ça vient poser pas mal de problèmes.
Primo : c’est une règle assez subjective. En effet, ce ne sont pas forcément les premières lettres qui comptent, mais le premier son : et à ce niveau-là, est-ce que c’est la syllabe entière qui compte, ou est-ce qu’il suffit d’un morceau de syllabe pour se faire biper ? Est-ce qu’on fait bien la différence entre les sons « é » et « è » ? Ca rajoute des complications superflues dans la logique de réflexion.
Secundo : il y a des cas où ça pourrait être très pratique de contourner cette règle, principalement parce que certains synonymes du mot à trouver commencent de la même façon, et pourraient totalement coller dans le processus de réflexion sémantique, sans ça. Or, si l’indice auquel on pense a le malheur de commencer par un son « a- » identique au mot de passe, on l’a dans l’os.
Et tertio : le jeu n’applique même pas cette logique jusqu’au bout ; puisque, s’il est interdit d’avoir des mots qui commencent pareil, il n’est en revanche pas interdit d’avoir des mots qui se terminent pareil… il faudrait se décider !
J’ai même l’impression que par moments, le jeu a tendance à un peu oublier cette règle. Je suis déjà tombé sur une émission où elle était pourtant édictée au début, mais où pour faire deviner « concret », celui qui devait deviner avait dit « abstrait », et celui qui devait faire deviner a dit « contraire »… pourtant, « contraire » et « concret », ça commence pareil, ça aurait dû être bipé selon leur logique !

Un autre point qui m’a un peu perturbé, c’est le fait que les mots de passe en question peuvent tout aussi bien être des noms communs, adjectifs, verbes, etc. que des noms propres.
Alors, c’est sans doute le fan de Pyramide qui parle, là ; puisque, dans ce jeu-là, les noms propres avaient droit à leur propre manche, et durant tout le reste du jeu, c’était exclusivement des mots trouvables dans la première partie du Larousse.
Donc le fait de devoir subitement faire deviner des noms propres dans MDP m’avait un peu choqué. Mais bon, ça reste mineur, et dans un sens, ça permet aussi de différencier un peu ce jeu de Pyramide.


Oui, ça me perturbe toujours un peu, les noms propres qui surgissent sans crier gare…

Les qualifications

La première partie du jeu va jouer sur ce principe de ping-pong verbal, d’une façon assez simple.
Les candidats et guests sont d’abord répartis en deux binômes candidat/guest.

Le candidat du premier binôme devra faire deviner 5 mots à son partenaire en un maximum de 30 secondes. Celui qui doit faire deviner a le premier mot sous les yeux, et peut réfléchir à la façon de le faire deviner avant de démarrer le chrono. Les mots peuvent être passés si besoin, et on peut revenir dessus s’il reste du temps.
Le candidat gagne un point par mot trouvé.


A noter : au bout d’un certain nombre de saisons, sur certaines passes, le mot à faire deviner n’est pas affiché à l’écran, afin que le spectateur puisse réfléchir en même temps que les candidats.

Puis c’est au tour de l’autre binôme de jouer, sur le même principe.
Ensuite, on revient au premier binôme, mais en inversant les rôles ; puis le second binôme fait de même. Et enfin, les guests échangent leurs places, et on reprend sur le même modèle que précédemment.
Ainsi, tout le monde aura eu l’occasion de deviner et faire deviner les mots, avec les deux guests.

C’est un principe assez basique, mais efficace ; et, mine de rien, assez stressant.
En fait, ce qui rend vraiment cette manche intéressante, c’est le fait que les 30 secondes passent très vite ; si bien que, même si on ne joue que sur le côté « un mot pour un autre » (d’une façon moins élaborée que Pyramide), ce n’est pas non plus une mince affaire de faire le score maximal. Même ne faire que deux ou trois points peut être considéré comme « bien », tant c’est facile de se laisser embourber avec un mot sur lequel on piétine, sans avoir le réflexe de passer. Et donc perdre du temps qui aurait servi à faire deviner le reste…

Tie-break et mots décisifs

En cas d’égalité, il est prévu un « ping-pong » entre binômes, avec un mot à faire deviner.
Cette fois-ci, il n’y a plus de chrono, mais les binômes jouent tour à tour. Le premier binôme tente de faire deviner un mot à son partenaire ; si celui-ci ne le trouve pas, la main passe à l’autre binôme, qui va tenter sa chance sur le même mot (et qui bénéficiera donc du mot indice donné précédemment). La main continuera de passer tant que le mot n’aura pas été trouvé. Le premier binôme qui le trouve voit son candidat être qualifié pour la finale.

Dans un sens, je trouve que c’est une idée plutôt bonne, dans la mesure où ça permet d’avoir une confrontation directe entre les candidats, là où les qualifications se jouaient « individuellement ».
En revanche… ça pouvait poser un petit problème, concernant le processus de réflexion. En effet, tous les mots ne se font pas deviner avec le même nombre d’indices, et très peu de mots peuvent être trouvés dès la première tentative ; ainsi, pour la plupart, il en faut minimum deux, ce qui suffit pour certains mots. Par conséquent, ça pouvait rendre cette manche légèrement injuste, selon les mots à trouver, qui restaient globalement relativement simples.

Je préfère le système employé en 2014-2016, où les candidats jouaient chacun leur tour sur le même mot de passe (avec l’un des binômes isolé, pour ne pas entendre la réflexion de celui qui joue en premier), et où le binôme qui trouvait le mot le plus rapidement gagnait.

Mots décisifs
Bon, l’habillage n’est pas très explicite, mais ce sont bien les Mots décisifs qui sont joués. On peut le voir notamment à l’absence de chronomètre.

En revanche, autant ce système de ping-pong pouvait encore à peu près passer pour départager une égalité ; autant les fois où il a été pleinement intégré en tant que manche à part entière, j’ai été beaucoup moins fan de l’idée.
Car en effet, pour les émissions en quotidienne de 2013 et 2020, il ne s’agissait plus d’un simple système de tie break, mais d’une manche jouée systématiquement pour déterminer qui disputera la finale.
Le score obtenu lors des qualifications sert alors uniquement à déterminer quel candidat allait avoir un avantage pour cette manche-ci : celui de pouvoir démarrer avec un point offert, et de décider s’il commençait à faire deviner le premier mot, ou laissait la main à l’autre binôme. En revanche, le score des qualifications est remis à zéro, et n’est pas cumulé avec celui de cette manche-là.
Un candidat devait alors arriver à un certain nombre de points en premier pour pouvoir accéder à la finale.

Et si je suis beaucoup moins fan de cette façon de sélectionner le finaliste, c’est parce qu’on a d’un seul coup trop d’emphase sur cette manche qui ne comporte que quatre ou cinq mots maximum… et plus assez sur les qualifications, qui sont plus impressionnantes, plus longues, et avec plus de mots joués.
Même si l’avantage conféré au vainqueur des qualifications n’est pas non plus négligeable, ça reste tout de même sur la manche de mots décisifs que tout se joue quoi qu’il arrive, avec comme je le disais non seulement moins de mots, mais également les défauts que j’ai cités plus haut.
Donc… pas convaincu. J’imagine que si on n’a retrouvé ce principe qu’en quotidienne, c’était pour rallonger l’émission de quelques minutes, afin qu’elle puisse pleinement occuper le créneau horaire alloué, là où la version week-end n’en avait pas besoin. Par conséquent, heureusement que ça n’a pas été rajouté dans la version week-end.

La finale : Qui veut gagner des millions… avec un mot pour un autre

Le candidat qui a obtenu le plus de points lors des manches précédentes va jouer en finale, avec la personnalité avec laquelle il aura été le plus performant (personnellement, j’aurais plutôt laissé le choix au candidat, mais bon).

Son but sera de passer plusieurs niveaux, rapportant chacun une certaine somme, en prenant garde à ne pas en perdre, au risque d’arrêter là la partie et de perdre ses gains accumulés jusque là (ou de retomber au palier de 2 500 €, qui reste garanti). Un système classique à la QVGDM, donc.

Le déroulement des niveaux est le suivant : le candidat a 1’30 pour faire deviner 5 mots à son coéquipier, sur le même principe que le reste de l’émission. Mais cette fois-ci, il ne disposera que de trois indices maximum pour faire deviner les mots ; et les mots passés sont définitivement perdus. On se rapproche un petit peu plus de Pyramide, avec l’idée du nombre de tentatives maximal.
Là où les niveaux vont se différencier, ce sera sur le nombre de mots disponibles à faire deviner : si, au début de la finale, le candidat disposera de 10 mots (9 à partir de 2012) pour en faire deviner 5 à son partenaire, il en aura de moins en moins au fil des niveaux, si bien que pour le dernier, il devra obligatoirement faire deviner les 5 qui lui seront proposés, sans droit à l’erreur.
Le candidat dispose d’un joker, qui lui permet de voir les 5 premiers mots qui seront à faire deviner pour le niveau suivant, lui permettant d’une part de prendre une décision concernant la poursuite de son parcours, et d’autre part, le cas échéant, de commencer à réfléchir sur la façon de faire deviner les mots en question.


Le nombre de points verts indique le nombre de mots trouvés ; le nombre de points gris, le nombre de tentatives restantes.
Donc ici, s’il trouve ce mot-là, on pourra lui dire… félicitations. C’était le cas de le dire.

Dans l’ensemble, pas grand-chose à dire au sujet de cette finale, qui reste basée sur un principe conventionnel mais efficace, avec un côté stratégique intéressant, et de nouvelles contraintes (les trois tentatives maximum) qui le sont tout autant. A part un chipotage sur le joker qui devrait à mon sens pouvoir permettre de révéler l’intégralité des mots plutôt que les 5 premiers seulement, mais c’est mineur.

On sent néanmoins que les ambitions ont été de plus en plus revues à la baisse au fil du temps, quand on voit l’évolution de la pyramide des gains… jugez par vous-mêmes :

Nombre de mots disponiblesVersion 1 (2009-2010)Version 2 (2010-2012 et hebdomadaires de 2013-2014)Version 3 (2014-2016 et quotidiennes de 2013)
101 000 €
92 500 €1 000 €1 000 €
85 000 €2 500 €2 500 €
710 000 €5 000 €5 000 €
625 000 €10 000 €10 000 €
5100 000 €50 000 €20 000 €

Et encore, je n’ai pas mis la version 2020 dans ce tableau (car elle est gérée un peu différemment, sans système de palier), mais celle-ci était descendue encore plus bas (on y reviendra).
Quelque part, c’est quand même un peu gênant, cette inéquité des gains accumulés au fil du temps, alors qu’à chaque fois, le gain maximum ne peut être obtenu qu’en faisant un sans-faute complet, dans les mêmes conditions. Ca s’explique pour diverses raisons (suppression d’un niveau en 2012, programmation quotidienne à partir de 2013), et plus globalement par un budget de France TV en baisse quasi-constante ; mais ça n’empêche pas de garder certaines incohérences (par exemple, en 2013-2014, il y a eu une cohabitation entre une version à 20 000 et une version à 50 000, selon si les candidats jouaient en quotidienne ou non… pas très logique).


Ah, le budget de France 2 sans cesse revu à la baisse… Les Inconnus avaient vu juste dans leur sketch de Fort Boyaux quand ils disaient que le service public n’avait plus de fric.

L’ambiance sérieuse

Pour en parler rapidement : ce jeu cherche à avoir une ambiance plutôt anxiogène et oppressante. En effet, la charte graphique très sombre, le style d’animation légèrement froid de Patrick Sabatier, la disposition du plateau de jeu, la musique… au premier abord, ce jeu ne semble pas très chaleureux. Mais bon, comme pour QVGDM, c’est davantage fait pour mettre l’accent sur l’importance des enjeux que pour lui donner un style totalement froid. En effet, la présence de people permet quand même de décontracter un peu l’atmosphère.

D’ailleurs, pour parler rapidement des people : … ça passe. J’étais un peu inquiet à l’idée d’avoir des guests qui changeaient à chaque émission (avec certains récurrents) ; mais globalement, le niveau durant cette période m’a semblé plutôt correct. Même si certains étaient plus doués que d’autres, je n’ai pas eu le souvenir d’une catastrophe à ce niveau-là (il faudra attendre 2020 pour ça…) ; et s’il y en a eu au moins une, elle devait alors être noyée au milieu d’un niveau de jeu globalement acceptable, donc suffisamment anecdotique pour ne pas en tenir compte.
Et, surtout : les guests prenaient le principe et l’ambiance au sérieux. Ca m’a fait plaisir, là où pour certains autres jeux type Tout le monde a son mot à dire, leur décontraction un peu trop poussée a au contraire tendance à me sortir du visionnage. Comme quoi, on peut avoir un jeu avec des people sans en faire des caisses au niveau du divertissement !
Bon, en revanche, si je devais chipoter sur quelque chose, ce serait évidemment le fait que, la plupart du temps, ils ne peuvent pas s’empêcher de faire leur promo pour leur activité du moment… mais vous connaissez le refrain.


C’est… sérieux. Un peu trop, même, voire anxiogène.

Concernant la charte graphique et sonore, en revanche, je suis un peu plus mitigé.
D’habitude, les ambiances froides et sérieuses, c’est quelque chose que j’adore ; mais ici… ça ne me paraissait finalement pas aussi indispensable que ça. On aurait pu avoir une ambiance sérieuse sans pour autant la rendre aussi froide. D’ailleurs, certains spectateurs auront reproché cet aspect-là au jeu ; et, pour une fois, je peux un peu les suivre à ce sujet.
Alors, non pas qu’elle soit ratée, loin s’en faut. Il n’y a rien de spécialement désagréable visuellement, et même si je ne suis pas spécialiste à ce sujet, je trouve que la charte graphique a été plutôt bien pensée, en s’articulant notamment autour du rouge, du noir et du blanc, pour appuyer l’ambiance recherchée.
Musicalement, par contre… ce n’est pas spécialement mauvais, mais la monotonie se fait ressentir très, très vite. Les jingles en quatre notes sont très répétitifs, et finissent par lasser ; et c’est encore pire pour la musique du générique, qui consiste en une répétition de ce jingle de quatre notes. Ce qui la rend très rébarbative, voire même gavante, d’autant plus qu’elle reste en tête. Entre ça et le générique des JT de France 2 à l’époque, je suis en train de me dire que baser un habillage sonore sur des jingles en quatre notes dans ce genre-là n’était franchement pas une bonne idée…

Mais en fin de compte, contrairement à des jeux type QVGDM, Le grand concours ou Le numéro gagnant, le jeu aurait tout aussi bien pu fonctionner avec une ambiance légèrement plus chaleureuse. Ce qu’a d’ailleurs fait la version Boccolini, dont on va parler tout de suite…


Un mot sur la version Boccolini…

En 2020, surprise : les jeux réinvestissent la case laissée vacante par l’arrêt de Motus (qui, on le rappelle, avait été supprimé par la direction des programmes de France TV à l’époque parce qu’il y avait soi-disant « trop de jeux » sur leurs antennes… hypocrisie, ton nom est France TV), avec en alternance le retour de Un mot peut en cacher un autre et de Mot de passe. MDP qui avait été arrêté à l’époque sans raison particulière, autre que « il fallait rajeunir l’image de la chaîne » (ah, le jeunisme de l’ère Delphine Ernotte… je ne vais pas m’appesantir dessus, je risquerais de devenir grossier) ; mais qui visiblement était subitement redevenu suffisamment à la mode pour avoir le privilège d’être diffusé sur une chaîne aussi sélective ! (ai-je déjà pointé du doigt l’hypocrisie de cette direction ?)
Et qui seront eux aussi arrêtés au bout d’un an parce que « trop chers » (et vu les moyens techniques alloués et les gains potentiels de ces versions-là, laissez-moi rire…), remplacés par une rediffusion du TLMASMAD de la veille (soupir…) ; mais ça nous aura permis de profiter encore un peu de ces concepts, dans des versions un peu remaniées.

Pour Mot de passe, le déroulement global ne connaît pas de modifications importantes : on a toujours un enchaînement Qualifications – Mots décisifs – Finale, avec les mêmes règles et les mêmes contraintes.
Ce qui changera le plus à ce niveau-là, ce sera la finale, avec un système de paliers un peu différent (… et que j’ai la flemme de résumer parce que c’est un peu long, allez voir sur Wikipédia) mais qui tient la route, et des gains évidemment beaucoup plus faibles qu’à l’époque (maximum 2 000 euros par émission… comparé aux 100 000 du tout début, ça fait mal), jeu de fin de matinée oblige. Mais rassurez-vous, c’est compensé par l’apparition d’un système de champion illimité pour que le candidat puisse gagner encore plus !
… non, désolé, ça ne compense pas grand-chose, en fait (et pas uniquement parce que j’ai une dent contre les systèmes de champion, comme vous le savez). Autant je pouvais encore accepter que la finale de la version Sabatier ne fasse gagner « que » 20 000 euros avec des contraintes à peu près semblables, autant ici, je trouve que ce n’est pas bien cher payé d’en faire gagner 10 fois moins à niveau de difficulté semblable. J’imagine que sans la comparaison, ça ne m’aurait pas fait plus tiquer que ça, mais là… quand on pense que 2000 euros, c’était grosso modo le montant du palier d’il y a 5 ans…
Néanmoins, je concède qu’il y a un côté un peu moins punitif, dans la mesure où rater un niveau n’empêche pas de continuer à jouer (ça empêche juste d’accéder au dernier et de tenter les 2000 euros), et que c’est le nombre de niveaux validés qui va déterminer le gain du candidat. Après, vu les sommes plus faibles en jeu, sortir du système à la QVGDM était le meilleur parti à prendre…


On n’affiche même plus de gains sur l’échelle… honte de dévoiler le manque de budget alloué au jeu ?

D’ailleurs, il n’y a pas que les gains pour lesquels le jeu a connu des économies, mais aussi le décor : en effet, l’émission est à présent tournée entièrement sur fond vert, sans public, avec uniquement l’animatrice, les candidats, les guests, et trois pupitres. Bon, visuellement, ça ne reste pas trop gênant ; mais j’imagine que pour les candidats et l’animatrice, ça devait faire bizarre durant les tournages de jouer sur un plateau encore plus aseptisé que celui de Des chiffres et des lettres.
Le jeu prend par ailleurs une identité visuelle beaucoup plus colorée, laissant tomber l’ambiance anxiogène de l’époque. Compréhensible, car plus adaptée au nouveau créneau horaire ; et pas spécialement dérangeant, car je ne trouvais pas que cette ambiance anxiogène apportait particulièrement quelque chose au format, comme j’ai eu l’occasion de le dire précédemment.
Musicalement, en revanche, on reste un peu dans la même veine, avec un style cependant moins répétitif (exit ces quatre notes que je n’arrivais plus à supporter…), ce qui est un bon point. Moins bon point en revanche pour les insertions musicales de la culture populaire de temps à autre (je sais que c’est loin d’être le seul jeu à le faire, mais encore une fois, quand on compare au matériau de base, on a l’impression de régresser…).


Ouaip, là, on sent clairement que l’ambiance froide et solennelle est morte et enterrée.

Mais contrairement à TLMVPSP pour qui le changement d’animateur a été plutôt profitable (enfin… disons qu’il est passé de « insupportable à regarder » à « particulièrement médiocre » – du moins avant que Jarry n’arrive…), pour Mot de passe, ça aura été plutôt l’inverse (même si, là encore, ce n’est pas du fait du changement d’incarnation à lui seul).
Si les ajustements que j’ai listés ci-dessus ne m’ont pas trop dérangé… les points suivants, en revanche, m’ont davantage fait froncer les sourcils.

Commençons par Laurence Boccolini : ce n’est pas le jeu pour lequel l’animation qu’elle a fournie était la meilleure, pour moi.
Bon, en soi, rien d’affreux. Le fait de lui donner un jeu avec une ambiance plus légère n’est pas déplaisant non plus, et je l’avais déjà pas mal appréciée dans Le mur infernal à l’époque, avec un style d’animation semblable. En outre, on la sent plutôt décontractée, donc on sent que ça lui plaît.
Mais dans MDP… je n’ai pas eu l’impression qu’elle était particulièrement inspirée par l’exercice. J’ai fini par trouver son style un peu répétitif… voire même un peu gavant par moments, notamment avec les fameux rappels du type « Nous respectons les règles de distanciation sociale ! » (époque Covid oblige) lorsqu’il fallait échanger son partenaire de jeu. Je sais que ce détail n’a l’air de rien ; mais il m’a particulièrement agacé. Comme pas mal de gens, j’ai très mal vécu le début des années 2020 à cause de l’omniprésence des règles sanitaires ; omniprésence également présente dans les programmes TV, où leur rappel constant n’aidait pas du tout à s’évader et à penser à autre chose (en plus de ça, on avait certaines productions qui s’en amusaient, notamment chez Air Prod/Banijay qui faisaient mettre à leur public des surmasques avec des sourires, sauf que c’était juste flippant et malaisant, et ça faisait finalement pire que mieux). Et pour un jeu qui n’avait pourtant pas de public, et où il était facile de passer outre cet impact visuel, l’animatrice ne trouve rien de mieux que de rappeler à chaque fois qu’on est dans une période de merde. Je vous avoue, ça m’a particulièrement irrité, ça, même en l’annonçant sur un ton jovial (en fait, je trouve ça presque pire d’essayer d’ironiser là-dessus – à nouveau, l’exemple des surmasques des productions Air Prod/Banijay peut en témoigner). Et bizarrement, dans UMPECUA, elle n’en parlait pas, il n’y avait que dans MDP qu’elle s’en donnait à cœur joie…
Ce qui fait que la seule chose que j’ai retenue de positif dans son style d’animation, ce sont… les têtes choquées qu’elle a pu faire lorsqu’un candidat ou une célébrité ont prononcé un mot totalement improbable. Je le reconnais, ça, c’était plutôt fun.

Après, ça ne fait que suivre l’ambiance recherchée, qui se veut plus légère, et surtout un peu plus verbeuse que celle qu’on a connu auparavant. Mais bon, ça ne reste clairement pas un point positif, pour moi. Encore une fois, la comparaison avec la version Sabatier, plus fluide, joue en la défaveur de la version Boccolini.


Ca pourrait presque devenir un meme Internet.

Mais le principal problème de cette version était une baisse de niveau palpable, en majorité due à un choix de guests douteux par moments.
J’avais été plutôt agréablement surpris de constater que, pour la version Sabatier, le niveau des célébrités était globalement correct : en effet, là où Pyramide garantissait un bon niveau avec des Maîtres-mots attitrés et « professionnels », ça semblait moins évident pour MDP en faisant appel à des people interchangeables ; mais finalement, le jeu s’en est plutôt bien sorti à ce niveau-là. Bon, je n’ai évidemment pas regardé l’intégralité des émissions de l’époque pour affirmer avec certitude qu’il n’y avait jamais eu de catastrophes ; mais compte tenu de la durée de diffusion de celles-ci, s’il y en a eu, elles ne devaient pas être très notables.
En revanche, cette version 2020… mon Dieu. Alors, certes, on a toujours des guests performants dans le lot, comme Denis Maréchal ou Florian Gazan. Mais à côté de ça, pour d’autres, le niveau était désespérant. Manque de vocabulaire pour certains, manque de pratique pour d’autres… il y en avait même quelques-uns qui semblaient complètement découvrir le principe juste avant que la caméra ne commence à tourner.
Et là, j’aimerais pousser un coup de gueule : une telle désinvolture par rapport au niveau de jeu, c’est quand même de l’irrespect, aussi bien pour le spectateur que pour les candidats. On ressent là tout le travers du « star system », où il suffit que quelqu’un soit suffisamment connu pour que ça lui octroie le droit de faire ce qui lui plaît, même quand il n’a pas de compétence particulière à ce sujet. Certains (dont je fais partie) voient comme une chance, voire un privilège, le fait de pouvoir jouer comme ça, dans une émission TV ; mais comme ils ont l’outrecuidance d’être des quidams lambda inconnus du grand public, ils doivent faire davantage d’efforts pour y participer (et, plus rarement, d’anciens candidats comme Bertrand Renard, Claire Gautraud ou Stéphane Crosnier peuvent décrocher un poste de titulaire, quand ils se sont encore plus démarqués sur leur niveau de jeu). J’ai tenté de passer un certain nombre de castings, à chaque fois sans succès. Et quand je vois que certains arrivent comme une fleur, sans même faire l’effort de se renseigner un minimum sur le principe du jeu (ou sans que la production ne les briefe plus sérieusement à ce sujet en amont), ça m’écœure. Et c’est irrespectueux pour les candidats, qui, eux, ont passé de vraies sélections, et peuvent potentiellement avoir un bon niveau de jeu gâché par un partenaire incompétent.


Précisons que pour tenter de faire deviner ce mot, le people a dit « Animal » en premier, puis… il a carrément roucoulé en guise de second mot. Et même si ce n’est pas précisé, ça fait partie des interdits pour des raisons plutôt évidentes… même Laurence Boccolini aura glissé un « Non mais t’es maboul ? » en arrière-plan.

Mais bon, en dépit de tout ce que j’ai pu reprocher à cette version de jeu, je ne l’ai pas non plus détestée. C’était quand même plutôt plaisant de retrouver un principe que j’aime bien ; et je reconnais que, passé l’énervement lié aux travers du fétichisme des producteurs pour les people en dépit de leurs capacités, certaines perles étaient plutôt amusantes prises comme ça.
Bref, si j’avais dû juger uniquement cette version-là, je l’aurais notée 10,5/20, en tant que jeu que j’arrive à apprécier… mais de justesse.

Total : 14/20

Mot de passe est un jeu qui a l’avantage de populariser un principe nuancé mais efficace, à base de mots à faire deviner, au travers d’une mécanique globale accessible.
En effet, si je ressens certes une légère frustration par rapport à Pyramide liée au fait que MDP ne développe pas plus que ça sa mécanique de jeu, je reconnais que ça lui offre néanmoins une plus grande accessibilité, qui lui aura sans doute permis de démocratiser un peu plus facilement ce concept de base, là où Pyramide aura parfois été un peu critiqué pour son côté incompréhensible auprès des néophytes. Et puis il avait tout de même ses quelques mérites, en particulier son côté davantage stressant lié au chronométrage.
Bref, même s’il compromettait un retour de Pyramide (enfin, pas tout à fait… on y reviendra dans deux articles) que j’aurais adoré, MDP n’a pas usurpé le petit succès et la longévité qu’il a pu connaître.

Bon, en matière de jeux où il faut faire deviner des mots, je viens de traiter l’amuse-bouche ; mais la prochaine fois, on va passer au plat de résistance, si vous le voulez bien…

garsiminium

Enchanté, moi c'est garsim. Bienvenue sur mon blog, où je parle de différents sujets, légers comme moins légers.

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